Cinquième jour. Je prends le 38, qui passe juste devant l’hôtel. Ai le projet d’aller jusqu’au bout de la ligne. Point Lobos. L’avenue est censée se jeter dans le Pacifique. C’est d’une grande beauté. A cet emplacement furent des Bains (« Sutro baths ») dont il ne reste que des ruines, mais au large, des petites îles et surtout les vagues énormes qui attirent les surfeurs.
Un sentier côtier conduit vers Land’s end, un bout du monde à ma portée. Les nuages ont envahi la Porte d’Or : les cornes de brume se sont éveillées. C’est une longue plainte sur deux notes : deux longues aigues, deux longues graves (quelque chose comme : « tuuuut, tuuuut » suivi de « paaaan, paaaan »). En marchant un peu, j’atteins un point où le Golden Gate Bridge se révèle : seul le haut des piles du pont sort du nuage. Image classique mais que je suis enchanté de voir en grandeur nature… curieuse sensation que celle de me retrouver ainsi au cœur de l’une des plus grandes villes des Etats-Unis, mais pourtant en pleine nature, face au pont le plus prestigieux du monde, qui enjambe la plus belle entrée dans un port, celle par où arrivaient les émigrants du dix-neuvième siècle (dont certains périrent dans des naufrages à cet endroit précis), et pourtant seul, ne croisant de loin en loin que quelques joggeurs et joggeuses, sous de grands pins qui gardent l’humidité du matin.
Retour vers The Cliff House, restaurant de luxe qui surplombe la côte, et au-delà, la plage, l’immense plage, Ocean Beach, que je longe pour rejoindre Fulton street. Descendant jusque là où les vagues viennent mourir sur le sable je tente de filmer des surfeurs quand, tout à coup, dans le champ de mon petit appareil, surgissent deux formes blanches et élancées, courant vers la mer : un garçon et une fille, nus, se tenant par la main et courant dans les vagues. Beauté de cet instant fragile et trop court. Ils remontent sur la plage, se rhabillent et s’en vont en se tenant toujours par la main… sur ma petite video, on ne les verra presque pas car j’étais vraiment trop loin, mais qu’importe. Je les ai vus et immortalisés. S’ils n’étaient partis dans une direction opposée à la mienne, je leur aurais demandé leur adresse email pour leur envoyer la video.
A Fulton street, je peux prendre le bus n°5, qui va m’emmener à proximité du musée de l’académie des sciences californienne, dans Golden Gate Park. Lieu splendide pour apprendre, plein de familles comme il se doit. L’expo sur les tremblements de terre donne les conseils essentiels à suivre en cas de séisme, fait la démonstration de la dérive des continents en montrant les espèces animales et végétales qui se sont trouvées séparées par les déchirures mais qui conservent un ADN commun de part et d’autre des océans (par exemple entre l’Amérique du sud et l’Australie). Surtout cette exposition donne l’occasion de vivre un tremblement de terre simulé dans une petite maison factice… quelques secondes de vibration. Le musée abrite aussi un dôme où sont enfermés des spécimens de forêts tropicales, de Madagascar et de Bornéo. Animaux étranges, grenouilles rouges minuscules, serpents et papillons voletant de branches en branches et se posant parfois sur les têtes des gens. En sous-sol : l’Amazonie et ses espèces géantes, anacondas et poissons énormes (pirarucu ou païche) qui passent au-dessus de nous comme des fantômes inquiétants.
Retour à l’hôtel. Le soir, Nous voulons faire réserver dans un restaurant japonais de Japantown par l’homme de la réception. Nous ne nous comprenons pas… et nous nous retrouvons avec une réservation pour le restaurant de l’hôtel à 8 heures… au nom de monsieur Sushi ! alors que dans le billet que j’avais donné, « Sushi » faisait évidemment partie du nom du restaurant où nous voulions aller ! Finalement, pas de réservation, ce n’était pas nécessaire. Nous arrivons dans JPtown, sélectionnons au hasard le restaurant Ibahana… car c’est le plus original : les convives sont assis autour d’une plaque chauffante et les cuisiniers viennent devant eux leur cuire les plats choisis, avec force numéros d’adresse avec les aliments ! Bruit effroyable. La plupart des gens sont là pour commémorer une fête, un anniversaire, une promotion. A notre table, un monsieur rougeaud, casquette vissée sur la tête vient nous saluer, « My name is Mike ! », vigoureuse poignée de main. Il est avec sa femme et sa fille, laquelle vient de réussir son concours d’infirmière. Quelques mots sont échangés avec elle, toute jeune fille ornée de piercings. Les convives de chaque table mangeant de façon synchrone, nous partons tous en même temps… les serveurs apportent des doggy-bags pour ceux et celles qui n’ont pas tout mangé. Dernier soir. Demain il faudra reprendre le chemin de la vieille Europe.
Belle balade, décidément… De la mer à l’aquarium, Monsieur Sushi aura exploré beaucoup de lieux enchanteurs…
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oui, merci, monsieur Sushi n’en a pas à se faire…
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