J’ai toujours aimé les voyages parce que sitôt sortis de nos frontières, nous trouvons toujours ne serait-ce qu’un minime écart par rapport à nos vies quotidiennes. Un écriteau bizarre, une boutique improbable, un rideau de feutre en travers d’une porte à tourniquet, des journaux épinglés sur des piques de bois sous les lambris d’un restaurant populaire et c’est immédiatement la fête ou tout à coup une vacance dans notre esprit, un filon pour la rêverie. Ainsi en partance pour l’Italie, je passe par la Suisse et dans le train Intercity qui relie la gare de Genève à… l’aéroport de Genève, ces phrases inscrites au-dessus des passagers :
« Pardonnez que je paie de mots ! Mes excuses ? Rien d’autre ne m’a été laissé que cette monnaie de singes pour subsister et me défendre du grand silence des morts ».
et puis en face :
« se connaît-on mieux à partir de ce qu’on écrit, puisqu’en écrivant, il arrive que l’on s’invente ? »
Ce sont des phrases d’une certaine Alice Rivaz, écrivaine genevoise née en 1901 et morte en 1998.
Décidément, ils sont bien philosophes, les trains suisses.