Passant rue de la Montagne Sainte-Geneviève, très récemment, j’ai vu que l’Hôtel du Commerce avait fermé. C’est là que jadis j’avais mes pénates, prêt chaque lundi à partir enseigner sur les hauteurs de Paris, vers Saint-Denis, là où l’évêque avait subi une décollation. Fermé pour cause de démolition. Pour construire à la place un trois-étoiles, que dis-je peut-être quatre ou cinq. En tout cas finies les chambres à cinquante, les escaliers grinçants. A l’angle de la rue, là où elle coupe celle des Ecoles, je m’arrêtai à l’Authre, café qui, contrairement à une lecture rapide, n’est pas dévolu à l’autre du même, mais à une rivière d’Auvergne. Là on me dit la triste nouvelle. Lors de l’un de mes séjours dans cette antre pour enseignants fauchés, j’écrivis un poème, que je vous donne à lire. Et qui va paraître aussi dans la future livraison de la revue Lichen, consacrée à la poésie et publiée par un sieur Elisée Bec qui vit à Banon (Alpes de Haute-Provence) et achète ses livres à la librairie « Le Bleuet ». Que grâce lui soit rendue pour son attention à ma modeste écriture.
Hôtel du Commerce.
Rue de la montagne Sainte Geneviève.
j’ai déjà pris, ici, le thé avec des Japonaises calligraphes
et de vieilles Suissesses échappées d’un château de Rilke.
La dame qui gère virevolte à sa banque,
et rit. Elle rit du matin jusqu’au soir,
et pour cela je lui offre du mimosa.
De la brèche entre ses incisives
s’échappe un vent clair, qui tinte
comme un muguet précoce.
Les escaliers vermoulus craquent et les murs se gondolent.
Cour avec une fontaine moussue,
chambres sans toilettes, douche au premier étage.
Le veilleur de nuit lit les auteurs russes et ne parle
que des vieux films, ceux qui ont encore le tremblé
des vieilles pellicules. Il se rêve en Modigliani,
éperdument aimé de Jeanne Herbuterne.
Il veille sur mon sommeil,
veille sur mes nuits,
comme un bouc tranquille
se lissant le poil.
Joli poème évidemment « hors-commerce »… 🙂
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merci!
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Ecrire un poème, prendre des photos …
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… et vous remercier de votre passage
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Bonjour Alain,
Merci pour ce poème, il me touche vraiment, j’ai été homme à tout faire dans un hôtel indépendant et inoubliable, je n’ose même pas vérifier s’il a fermé depuis… C’est quand même un grand bout de culture ces hôtels où « on descend », à la Jules Maigret, avec des gens qui bossent là mais qui pourrait être ailleurs, mais qui veulent pas… Moi j’ai croisé une vieille dame Balte odieuse qui balançait les coussins hors de la chambre quand ils étaient trop mou mais qui se cachait le cœur d’or sous une sale couenne mal embouchée. Qu’est ce qu’elle va devenir à l’Ibis ou au Airbnb avec toute sa névrose ?
Continuez !
Cordialement,
JF
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Bonjour Jean-François
merci de votre commentaire. Oui, je regrette aussi cette époque. Je suis repassé récemment devant cet ancien hôtel, maintenant c’est un 5 étoiles avec spa etc. chambre à 500 euros! J’aimais beaucoup la gérante. Aujourd’hui, elle s’est recyclée dans les visites touristiques. Quant au gardien de nuit, je ne sais ce qu’il est devenu…
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