Une maison dans un village

??????????????????????C’est ici. C’est celle qui a la façade en crépis et un toit de tuiles provençales. Un alignement de trois fenêtres dont les volets sont du bleu de la lavande. Elle regarde vers le bas, vers la route montant de la vallée et du bourg où l’on peut se recharger en victuailles. Il doit bien y avoir là-bas une épicerie. Une boulangerie. Un café. Peut-être même on peut y manger, dans ce café. Puis, plus loin, un lavoir au bord d’un ruisseau. Une rivière. La route de Nyons. Mais rien de tout cela dans ce village-ci.  Juste devant, il y a un arbre qu’on n’aperçoit pas sur la photo.  C’est un olivier. Seul bout de terrain. Il est en forme de lunule. Il a été probablement mis là pour que ce soit plus facile pour les paysans d’autrefois d’entrer leur charrette et leurs trois chèvres dans la cave voutée qui sert de rez-de-chaussée, c’est donc un léger coude pour permettre un virage. Devenu depuis inutile. On ne se sert plus de la cave pour y entrer un véhicule. Des animaux. Alors on a fait pousser dessus un olivier. Il donne des fruits. Il vit. Sur le mur latéral, celui qui n’est pas adossé à une autre maison, pousse un figuier. Lui aussi donne des fruits. Il paraît qu’en été les voyageurs – ceux qui marchent le long d’un GR qui passe par là, ou bien les cyclistes, qui aiment à se promener par ici, en ce lieu qui n’est pas si loin du Mont Ventoux, haut lieu du cyclisme mondial – s’arrêtent pour manger des figues. Grand bien leur fasse. Je ne mangerai pas toutes les figues. Ce qu’on voit comme verdure juste devant la maison, c’est une vigne, qui sert de tonnelle au-dessus de la petite terrasse à laquelle on accède par un escalier aux marches inégales de grosses pierres ocre et grises. Derrière la maison, il y a une ruelle, qu’on ne voit pas ici bien sûr. Mais immédiatement au-delà, c’est la colline qui commence, pleine de verdure, de buis, de cistes et de chênes verts. De ci de là un pin, surtout quand on monte vers le col, juste au-dessus du village, et par lequel on arrive, venant de la route de Remuzat. Vous vous souvenez de Remuzat, que Barbara chantait. De temps en temps, dans le ciel, tournoient des vautours, qui viennent d’un élevage tout près de ce village. En avant de la photo, plus loin que l’endroit d’où la photo est prise, le village se prolonge par un promontoire qui domine la vallée, d’où l’on voit très bien le Mont Ventoux. Les soirs d’été, on n’y entend que les grillons.

A l’intérieur, il paraît que parfois on entend le mistral siffler en passant sous les tuiles. Je pense à tous les gens que j’aimerais inviter en ce lieu. Aux nuits futures. Aux petits matins où j’enfourcherai ma bicyclette pour escalader le col. Aux soirées tièdes où nous referons le monde autour d’un bon vin issu des caves de Suze. Aux ruches qui bourdonneront au bord du précipice. A ma sieste entrecoupée de cris d’enfants.

arbre

Ce week-end, un mistral glacé soufflait sur ces lieux, il n’était guère possible d’aller très loin à pieds dans la montagne tant il faisait froid et tant il fallait s’arc-bouter contre le vent, mais ça ne fait rien, on peut quand même aller au long d’un chemin qui grimpe vers un col assez bas et conduit vers le village suivant. Dès que l’on est à ce col, on est perdu entre les buissons de buis, les genêts et les conifères qui nous semblent malades car tous envahis par de curieux cocons blanchâtres, réseaux de fils denses, tels des écheveaux autour d’une quenouille, mais il s’agit en réalité des abris que se construisent les chenilles processionnaires pour se protéger du froid. Quelques arbres torturés gardent l’accès aux nuages bas et violets dont les bords de temps en temps s’ourlent d’un éclat solaire. Au loin, le Ventoux, blanc et théâtral, asseyant sa puissance sur les montagnes environnantes.

Ventoux

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3 commentaires pour Une maison dans un village

  1. Lavande, le mont Ventoux, tuiles provençales… le paradis est bien sur terre.

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  2. Tout ce que j’aime et plus encore !
    Merci pour ce texte et ces photos qui m’aident à respirer…

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  3. Debbie dit :

    Beau coin. J’ai mon propre petit coin de paradis où je m’installe au bord de l’Eygues en été, dans un camping pour quinze jours, vraisemblablement pas trop loin de votre pays.
    Il y a des fois où des maisons me pèsent ; où je ne supporte pas les quatre murs, surtout en été.
    Oui, c’est un endroit magique. Merci pour les photos, le beau texte.

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