C’est à n’y rien comprendre

Dominique Strauss-Kahn venait d’être arrêté à New-York, c’était un coup de tonnerre, d’ailleurs Martine Aubry l’avait dit. On ne s’y attendait pas. Tout simplement parce que les petites gens, les gens comme nous, comme moi, comme vous, ceux qui ne comptent pas et servent principalement à voter, n’étaient pas au courant, rêvaient des histoires de fées et voyaient le monde comme la petite maison dans la prairie. Ils n’auraient pas pensé, nous n’aurions pas pensé qu’il pouvait en être ainsi. Peu de temps après, effondré, j’écoutais la radio. Sur France Culture, on diffusait des témoignages d’Hiroshima. De gens qui avaient vu le feu tomber sur eux. Pour qui cela avait été vraiment un coup de tonnerre. Je me suis mis à penser que décidément ce n’était pas comme on pense le plus souvent. On croit en une rationalité, on s’imagine que l’avenir est tracé, qu’il va bon train dans un vide sidéral. Où les choses avancent sans frottement. On croit que l’air est pur et que les choses sont transparentes. Puis arrive le chaos. Arrive n’importe quoi. En réalité nous sommes dans une trame étrange. Les mailles de cette trame sont faites d’une matière étrangère à la nôtre. On croit la deviner, la maîtriser, la connaître. On ne connaît rien. Demain qui sait, la Terre peut s’ouvrir sous nos pieds. Des évènements que nous n’avons jamais prévus peuvent arriver. Peut-être demain la Guerre. La Guerre en Europe, là où on nous a habitué à penser que c’était fini et que tout le monde allait bien s’entendre maintenant. Mais le cours de l’histoire ne s’arrête pas. Peut-être demain, un pouvoir extrémiste va s’emparer des gouvernes de ce pays. Peut-être demain, d’autres pays vont devenir aussi fous. Peut-être ce que nous avions pensé de mieux pour la fin de nos jours et pour la continuation des jours, le fil du temps de nos enfants et de nos petits-enfants, ne se réaliserait pas, mais au contraire des bouleversements, des révoltes qui grondent. Des gens qui se déchirent. Des armées qui se forment. On n’a rien à se reprocher, si ce n’est de n’y rien comprendre.

Salvador Dali – le chevalier de l’apocalyse

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10 commentaires pour C’est à n’y rien comprendre

  1. Oui, on ne peut prévoir l’imprévisible…

    Même pour DSK (la catastrophe n’est pas au même niveau que Fukushima, bien sûr !), le « complot » risque de se révéler comme celui qu’il aurait monté tout seul contre lui-même, par une sorte d’acte manqué, complètement manqué.

    Les preuves du forfait s’accumulent, les tests ADN se précisent, les indices concordent, l’alibi de l’heure est mis à bas par la police américaine, DSK est maintenant dans la salle d’audience où la juge lui signifie les charges qui pèsent contre lui.

    Il n’a pas prévu la suite.

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  2. michèle dit :

    Ben moi, j’y crois aux miracles, et je dis pas tous les jours ce serait mentir, mais enfin souvent quand même, la vie me donne raison.

    Lui, c’est une chance qui lui arrive, cette honte-là à la face du monde ; cela lui donnera l’opportunité de considérer la femme comme un être humain pensant et désirant.

    Pour nous aussi c’est une chance : on va éviter le sort de l’Italie berlusconnienne. Mille soulagements d’éviter un chef de l’État qui a toute honte bue.

    Sur la femme, ai lu ces deux lignes, hier, qui m’ont fait hurler de rire, alors même que je rompais ma promesse faite à moi-même de ne plus travailler le dimanche, à propos d’une femme justement elle est tout le temps dans la lune, elle n’est pas productive .

    J’adore cette phrase là : elle me rend gaie.

    Bonne soirée à vous ; d’ici 2012, de la glèbe vont sortir des forces neuves et dynamiques. Nous, maintenant ( c’est à dire vous les hommes et nous les femmes ) nous ne voulons plus vivre en guerre, ni subir des accidents gravissimes pour la planète et ses humains type Fukushima. Tous ces évènements rase-mottes ( si je puis me permettre, quoique cela soit un tantinet vulgaire, mais bon, la situation l’est en elle-même ) nous emmènent à plus d’authenticité, un avenir différent.

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  3. lignes bleues dit :

    Alain, avec ou sans DSK, il m’arrive souvent d’avoir des pensées comme celles que vous exprimez. Michèle je voudrais partager vôtre optimisme. A vous trois : l’intervention de Jack Lang ce soir : « tout de même, il n’y a pas mort d’homme » soudain, une grande vague de tristesse et d’envie de vomir : se taire.

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  4. michèle dit :

    >lignes bleues
    d’accord pour se taire avec vous ce soir.
    sans doute cette forme là d’optimisme de charbonnier m’est-elle venue hier soir, en chopant au pif un petit bouquin, très petit, de Paul Arène qui s’appelle Jean des figues. Collection Nelson ; il partait au pilon, je lui ai sauvé la vie. On s’aime désormais, depuis hier soir. Jusque là il traînaillait, indolent.
    Trois fois rien, mais il dit tout ; dont le bonheur tranquille dont parlait Alain il y a quelques jours et qui m’avait fait rêver.

    Ou peut-être aussi parce que je rencontre des jeunes magnifiques, qui me remplissent le cœur de fierté. Qui m’ont parlé de Louise Bourgeois, d’Artemisia Gentileschi et du palais du facteur cheval et de David Hockney dont j’aime la route*, mais eux m’ont parlé de l’autoroute**, normal, ils ont tant raison, les grands espaces…
    ** la leur
    http://davidhockney.online.fr/pacificcoast.htm

    * ma mienne ( mais j’en ai d’autres z’aussi )
    http://www.artliste.com/david-hockney/road-across-wolds-225.html

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  5. alainlecomte dit :

    Oui, quelle honte… Dans mon billet, j’ai voulu mettre l’accent sur notre naïveté, nous avons une vision idyllique, et puis la hideuse face de la réalité se dévoile. DSK? un vulgaire violeur… quel gâchis. Je viens d’apprendre pour Jack Lang… en effet, c’est bien triste.

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  6. lignes bleues dit :

    oui Michèle, un peu de peinture, ça ne console pas, ça distrait, mais finalement, non, ça console aussi

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  7. JEA dit :

    Jean-Claude Pirotte :

    – « Nous ne sommes que des personnages très secondaires, très effacés, des figurants égarés, mais les figurants sont au monde comme les arbres et les planètes, comme les amours perdues et les corbeaux attentifs. »

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  8. JEA dit :

    Jean-Claude Pirotte :

    – « L’âme serait cette vapeur moite qui flotte dans le petit matin, avant de disparaître au bout de l’enfer. »

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  9. michèle dit :

    sur Jack Lang une remarque, il devrait aller séjourner quelque temps aux States, car il a commis un impair de première : inquiète par les relations franco-américaines, j’y suis allée, il y a peu, en pantoufles et gants de soie.

    Et là-bas, grand branle-bas : dès que les américains après la question rituelle « where do you come from ? » entendaient notre « from Frannnce » ( avé l’accent traînant ) ils avaient une attitude inoubliable : levant les deux bras au ciel, se trémoussant de l’arrière-train, ils commençaient à glapir avec des gloussements de joie « oh yeah France, I love France !  » suivi de « How wonderful you are french… ».

    Dans les cinq à quinze minutes, nous étions reparties, et moi, deux mois durant j’ai eu l’impression d’être une reine, aimée au possible. C’était le top.

    Alors dire que les américains veulent avoir la peau d’un français, c’est une grande erreur de jugement, il a dû se laisser emporter par l’émotion : nous les français, aux États-Unis d’Amérique, nous sommes aimés ( ceci malgré/bien au-delà de nos divergences d’opinion sur la guerre en Irak ).

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