On a beaucoup critiqué le spectacle « Un tramway » mis en scène à l’Odéon par Krzystof Warlikowski, avec la grande Isabelle Huppert dans le rôle principal. Que n’a-t-on pas dit ? que la scénographie était glaciale (un tunnel de plexiglas qui avance et recule selon les besoins, et symbolise un intérieur exigu, salle de bains, salon, couloir tout en même temps), que Huppert en faisait trop, qu’elle écrasait les autres comédiens et que Tennesse Williams était bien loin. Il y a quelque chose de vrai dans tout cela, et pourtant c’est beau. Beau tout de même. Et ce qu’on n’a pas souvent dit : drôle, aussi. La comédienne blonde apparaît au début de la pièce assise jambes écartées, quelque chose dans la bouche qui l’empêche de parler, on n’entend que des borborygmes. Une caméra numérique la filme, son image est projetée en arrière plan, selon un dispositif utilisé tout au long de la pièce. Complétion du théâtre par le cinéma ou l’inverse, en tout cas moyen de combler ce désavantage qu’a le théâtre de ne pouvoir jamais grossir un détail. Esthétique glacée, certes. Clinique ? On pourrait le prétendre. Certains critiques ont comparé la prestation d’Isabelle Huppert dans cette première scène à celle qu’elle avait eue dans la pièce de Sarah Kane où elle s’illustra jadis : fantastique mise en scène de la folie. Oui, on est loin de Tennessee Williams et de son atmosphère moite, de ses gens paumés, poissons qui n’en finissent pas d’agoniser hors de l’eau. Ici, les intérieurs sont cleans et les habillages méticuleux. Mais ne faut-il pas oublier Tennessee ? Le texte est un collage, on l’a dit déjà. On y trouve du Platon (le Banquet) mais aussi du Tasse (« la Jérusalem délivrée »), longue scène qui en a agacé plus d’un, mais qui personnellement m’a fasciné : sur musique de Monteverdi façon rock interprétée par une chanteuse de blues excellente (Renate Jett), le livret de « Tancrede et Clorinde » défile en fond de scène. On peut se demander quelle en est la raison d’être… or, cette histoire de combat entre un homme et une femme, la femme étant déguisée en homme, fait écho au malheur refoulé de Blanche Dubois, relié à une histoire d’homosexualité de son ex-compagnon qu’elle n’a jamais oublié. Il a beaucoup été dit que même Coluche était cité. Je ne connais pas l’œuvre complète de l’humoriste au nez rouge mais je présume que l’histoire du mec qui commande un poulet de Bresse est visée (dernière scène, racontée par le beau-frère, qui ne fait jamais dans la dentelle). J’ai aimé – pas l’histoire du poulet de Bresse, non, mais la pièce en entier. Pourtant j’étais sous les combles (place à 10 euros, délivrée au dernier moment), ce qui permettait, avant le début, d’admirer de près le tourbillonnant plafond d’André Masson qui répondait par son mouvement aux élans hystériques de la belle Isabelle.
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Amusant… car j’avais vu cette pièce en mars 2010, et Le Chasse-clou en garde encore la trace : on peut même retrouver dans l’article la photo du plafond magnifiquement peint par André Masson !
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Ah oui, en effet c’est amusant! presque la même photo, nous devions être à peu près à la même place! (2ème balcon au plus près de la scène)
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Sur le site dit de Coluche :
– « C’est un mec qui est au resto et il a commandé un poulet de Bresse. Alors on lui apporte un poulet, il met le doigt dans le cul du poulet et il fait : « Non, ça c’est un poulet du Gers ! ». Alors le garçon est emmerdé, il apporte un autre poulet, le mec met le doigt dans le cul du poulet et le mec dit : « Non, ça c’est un poulet des Landes ! ». Alors on lui apporte un autre poulet et il met le doigt dans le cul du poulet et il fait : « Ah ça, oui ça c’est un poulet de Bresse. ». Et y’a un mec qui se lève et qui lui dit : « Dis donc, moi je suis orphelin, vous pouvez pas me dire d’où je viens ? ».
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oui, JEA, c’est tout à fait ça… c’est le texte exact. Je ne la connaissais pas. Je la trouve assez drôle, mais de là à savoir pourquoi elle est insérée dans la pièce… Je vais aller voir sur ce site si des fois, il y en a d’autres….
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@ Alain L : oui, on était tout en haut… ce qui donne un peu de recul vis-à-vis de la pièce, sans doute, on n’entre pas alors vraiment dedans mais la performance d’Isabelle Huppert était remarquable, ainsi que les décors, la mise en scène et le plafond !
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Mais enfin, tout le monde devrait tout de même savoir que le poulet de Bresse a les pattes bleues!
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