Côte à côte, deux écrivains qui ont déjà suscité en moi des rappels de jeunesse : Annie Ernaux et Philippe Forest. La première au travers de ses premiers romans, courts et directs pour évoquer ce qu’est une vie dans un milieu modeste et le sentiment de presque trahison à s’en éloigner pour accéder à une carrière d’intellectuel. Le second par sa fresque récente portant sur l’histoire de l’aviation moderne incarnée par celle d’un père qui pilotait pour Air France. Comme je l’ai raconté ici, ce n’était pas exactement le cas du mien qui, lui, se contentait de rester au sol pour réparer les avions.
A la première, je tends un exemplaire du petit récit qu’elle vient d’écrire, consacré à la sœur morte qu’elle n’a jamais connue, pour dédicace (à C.). Moi, fièrement : « j’étais déjà venu vous voir il y a deux ans ». Elle, tristement, me corrige : « c’était il y a trois ans… oui, le temps passe ». C’était pour « Les Années ». Trois ans… de quoi écrire trois nouveaux chapitres aux « Années » ? Ce serait même quatre, me dit-elle, puisque le livre s’arrête en 2007. Mais elle m’assure qu’il n’y aura pas de suite. Annie Ernaux est une de ces personnes qui, d’un regard, pourrait vous transformer en statue de sel. Croiser son regard bleu très clair, si clair et si profond en même temps, s’apparente à une épreuve. Elle impose un respect immense. Un peu plus tard, elle s’en va, lente et majestueuse, au bras d’un monsieur venu la chercher…
Pour le second, je n’avais pas apporté le livre pour le faire dédicacer, mais – puisqu’il n’y avait pas grand monde en ce dimanche de printemps radieux où, manifestement, les gens avaient préféré se répandre dans la nature environnante – je m’enhardis à lui adresser la parole. C’est important pour moi que je lui fasse remarquer que son livre, pour excellent qu’il soit, ne parle de l’aventure aérienne qu’au travers des pilotes, des gens qui ont la tâche « noble », et je lui reproche de n’avoir rien dit des obscurs, des sans grade. Un peu gêné, il me répond que c’est un autre livre qu’il faudrait écrire…
Je n’ai pas de photo, cette fois… par respect pour eux, je n’ai pas osé les mitrailler à bout portant.
Elle n’est pas sortie de sa nuit, voilà peut-être pourquoi ses regards…
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Philippe Forest a écrit récemment une préface à la réédition de L’Immaculée Conception » d’André Breton et Paul Eluard : son éclectisme fait plaisir à voir, il sait où planer et aime les nuages…
Annie Ernaux, oui, elle aime aussi se faire photographier !
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Fan d’Annie… Toi, c’est Ernaux ; moi, c’est … Chancel (qui sait ? ahahahah)
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