Ignare que j’étais, je ne connaissais pas encore Rosetta Loy lorsque j’ai découvert ce petit livre jaune pâle orné d’une esquisse de bicyclette, aux éditions Liana Levi, et qui justement s’intitule « La bicyclette ». Rien à voir avec « La bicyclette bleue », cette saga de Régine Desforges dont on fit un film avec la magnifique Laetitia Casta, non, rien de « spectaculaire » ici et… la bicyclette est singulièrement absente, sauf à la dernière ligne du roman où il est écrit : « Elle m’apprit à aller en bicyclette. Une Legnano gris argent ».
Il s’agit bien pourtant d’une saga. Saga d’une famille pendant et juste après la guerre, ponctuée de treize chapitres qui tous portent le nom d’une espèce végétale : la glycine, les acacias, les asters d’automne, les ancolies, l’ortie, l’aconit, les tilleuls, les aubépines etc. Famille riche avec des domestiques, vivant dans un quasi château, opposants muets au fascisme, avec un enfant, Giovanni, parti combattre les Allemands dans un uniforme trop grand et des chaussures éculées. Histoires d’amour furtives entre les enfants de la famille bourgeoise et des paysannes (Piera, qui finira à Turin dans l’odeur des saucissons et des gorgonzolas), personnages qui demeurent, comme le dit Natalia Ginzburg dans sa préface, des adolescents tout au long de leur vie (« L’adolescence est chez les personnages de ce roman une condition humaine indépassable »), méditation recueillie sur les drames intimes des familles (« les enfants préférés ça n’existe pas, il y a seulement des enfants avec qui l’amour est un échange facile »). Mais ce qui frappe le plus dans ce roman, c’est son écriture : on retrouve chez Rosetta Loy, cet²te manière radicale de vouloir faire entrer la littérature dans l’art que l’on a pu voir aux débuts du Nouveau Roman, et qui consiste à utiliser le langage comme on se sert d’une brosse ou d’un pinceau, décrivant les êtres au même rang que les choses et finissant par produire un de ces tableaux que l’on peut comparer à un Cézanne tant les personnages se fondent dans l’ocre des pierres et le vert argent des pins parasols.
C’est Régine DEforges et non Régine DESforges : cette erreur très fréquente énerve toujours l’ex diva des « meilleures ventes » de l’édition française.
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argh… alors DEforges, si ça fait tant de peine à la dame qu’on l’écorche (enfin, son nom, pas elle…)
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