Je n’aurais jamais soupçonné que la question tibétaine allait faire surgir de telles réactions à gauche. A croire que les vieux fantômes sont de retour. Ainsi quand ce brave monsieur Mélanchon, sénateur de l’Essonne de son état, et ci-devant chantre d’une gauche dure (ce que, en soi, je suis loin de réprouver… car nous en avons besoin), sur son blog , tient des propos stupéfiants, réglant son pas sur celui d’une député allemande du parti Die Linke qui déjà il y a quelques semaines… des propos où carrément, n’y allant pas par quatre chemins, il assimile le Dalaï-Lama à l’ayatollah Khomeiny, le traite (mais il n’est pas le seul, un certain Christophe Girard, adjoint à la culture du maire de Paris, a entonné le même refrain aujourd’hui) de « chef religieux réactionnaire » et n’hésite pas un seul instant à caricaturer l’histoire et la civilisation tibétaines (d’où lui vient ce « savoir », qu’il cite ses sources au moins ! quant à moi, modestement, je les ai prises chez des spécialistes du Tibet, Stein par exemple, ou bien cette anthropologue qui intervenait récemment dans « le Monde », Katia Buffetrille, plus connue que Jean-Luc Mélenchon comme tibétologue) en écrivant sur le plan de l’histoire :
« Le Tibet est chinois depuis le quatorzième siècle. Lhassa était sous autorité chinoise puis mandchoue avant que Besançon ou Dôle soient sous l’autorité des rois de France. Parler « d’invasion » en 1959 pour qualifier un évènement à l’intérieur de la révolution chinoise est aberrant. Dit-on que la France a « envahi » la Vendée quand les armées de notre République y sont entrées contre les insurgés royalistes du cru ? »
Et plus loin sur celui de la société :
« Dans une négation des traditions, que j’approuve entièrement, les communistes ont abrogé les codes qui classaient la population en trois catégories et neuf classes dont le prix de la vie était précisé, codes qui donnaient aux propriétaires de serfs et d’esclaves le droit de vie, de mort et de tortures sur eux » (complètement démenti par K. Buffetrille dans l’interview qu’elle a donné au Monde).
Et il conclut :
« Je n’ai jamais soutenu l’Ayatollah Khomeiny, même quand j’étais contre le Shah d’Iran. Je ne soutiens pas davantage ni n’encourage le Dalaï Lama, ni dans sa religion qui ne me concerne pas, ni dans ses prétentions politiques que je désapprouve ni dans ses tentatives sécessionnistes que je condamne. Je demande: pourquoi pour exercer sa religion et la diriger le Dalaï Lama aurait-il besoin d’un Etat ? Un Etat qui pour être constitué demanderait d’amputer la Chine du quart de sa surface! Son magistère moral et religieux actuel souffre-t-il de n’être assis sur aucune royauté ? »
J’ai les jambes qui flagellent après avoir lu ça. Monsieur Mélenchon nous prend-il à ce point pour des crétins qu’il pense pouvoir impunément faire comme si nous n’avions pas tous lu les déclarations du Dalaï-Lama dans lesquelles il annonce haut et fort ne pas revendiquer l’indépendance ? Demander simplement un statut négocié qui permettrait aux nombreux réfugiés qui vivent en Inde, sans avenir, de rentrer chez eux ? Monsieur Mélenchon nous prend-il pour des imbéciles au point qu’il voudrait nous faire avaler la couleuvre d’un Dalaï-Lama obscurantiste, uniquement préoccupé de faire bruler de l’encens devant des dragons grimaçants, alors qu’il est certainement le seul chef spirituel actuel à discuter philosophie avec de nombreux scientifiques dans des domaines aussi divers que la physique et les sciences cognitives ?
Faut-il continuer à dénigrer, dénaturer, inventer des mensonges de toutes pièces pour faire valoir sa propre vision du monde, vision du monde d’ailleurs incompréhensible et dépassée : Jean-Luc Mélenchon croit-il encore en la nature authentiquement « communiste » du régime chinois ?
Dans tous mes billets sur le Tibet, j’ai tenu à respecter ce qui me semble être l’objectivité, je ne crois pas qu’on puisse m’accuser d’avoir céder au courant d’émotion qui parcourt l’Occident, il est vrai de manière un peu facile, j’ai voulu chercher et proposer des analyses lucides, sans être dupe de ce qu’une propagande qui existe bel et bien, du côté tibétain, cherche à nous faire accroire, sans accepter l’image doucereuse d’un bouddhisme plein de fleurs roses et de mignons sourires de lamas. Mais ce n’est pas pour tomber dans le piège de « l’autre camp ». Jean-Luc Mélenchon et les autres dénoncent avec raison ce qu’il peut y avoir de racisme anti-chinois en Occident dans les manifestations actuelles (et j’ajouterai de peur face à la montée d’une grande puissance économique), mais depuis quand la lutte contre un racisme doit-elle revêtir les habits d’un autre racisme ? Pourquoi au nom du combat contre le racisme anti-chinois faudrait-il épouser les thèses du racisme chinois anti-tibétain ? Avez-vous lu la lettre d’une jeune Tibétaine en Chine, publiée sur le blog Journal d’un Chinois ?
Quelle différence doit-on faire entre le vécu éprouvé d’une Tibétaine en Chine et celui d’un Maghrébin à Paris quand ils ressentent et disent des choses similaires sur leur vie ?
On devrait d’abord balayer devant sa porte ? C’est ça que vous voulez dire aussi, monsieur Mélenchon ? Bon, là, j’accepte assez le message, mais depuis que le monde est devenu ce village, et que nous n’y pouvons rien, et que vous non plus vous n’y pouvez rien, monsieur Mélenchon, à moins de passer pour le héraut d’un passé stalinien, est-ce de ma faute à moi, si ma porte ouvre aussi sur les champs de neige du Tibet ?
Oui, on est vraiment interdits par l’absence de retenue, de bon sens, d’intelligence et de compréhension. Dans ce brouillage permanent d’informations et de jugements à l’emporte-pièce, les opinions publiques réagissent émotionnellement, pour le meilleur et pour le pire dans un univers manichéen, simplifié à l’extrême
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Emotions et « immédiateté » (ce n’est pas français, je sais… mais tu me diras le bon mot, Alain ?) sont les deux grandes plaies qui forment l’opinion publique et sur lesquelles surfent nos politiques… Essayer d’avoir un raisonnement et prendre du recul, sont-ce deux comportements totalement dépassés ?
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Je ne sais pas pourquoi quelqu’un écoute encore les imbécilités de monsieur Mélenchon .
Cet homme m’effare à chacune de ces interventions. Je suis tout à fait aussi sidéré par cette vision de la gauche à tendance communiste (PC, gauche du PS) de voir encore en la Chine un pays communiste et donc de se laisser prendre par sa propagande.
Il faudra qu’on m’explique en quoi la Chine est communiste en dehors de ces statuts et non une dictature ultra capitaliste de la pire espèce (je parle évidement du régime est non des chinois qui eux subissent aussi tout cela).
Mélenchon devrait quitter le PS il n’y a plus sa place(s’il l’a jamais eu), pas plus qu’il ne l’a au près des mouvements de gauches progressistes, c’est un dinosaure sans avenir et dangereux (bref je ne l’aime vraiment pas).
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