J’arrive vers 11h30 à la MC2. Objectif : débats des « Journées du Renouveau », organisés par Libé et Marianne. Il est nécessaire de prendre une réservation (gratuite) avant d’entrer dans une des salles où ont lieu les débats. C’est l’heure de Mélenchon (qui débat avec J. F. Kahn), mais aussi celle de Védrine vs Bové. Au guichet où se délivrent les sésames : cohue. « Mélenchon ! », « Mélenchon ! », « Mélenchon ! ». La dame s’exécute, distribuant ses tickets « Mélenchon » à toutes volées. Elle-même les brade comme des salades en fin de marché, « demandez mes Mélanchon ! », « Mélenchon ? », « Mélenchon ? ». Quand je balance un sobre « non, Védrine », tous les regards convergent vers moi. Ah bon ? Ben oui, je suis las des effets de manche et des rhétoriques néo-staliniennes (je viens d’apprendre que non content de continuer à applaudir sur la « réussite » de Cuba et les bonnes raisons qu’a la Chine d’opprimer le Tibet, Jean-Luc M. s’oppose à l’enseignement des langues minoritaires, telles que le breton, au prétexte que « les bretonnants auraient collaboré pendant la seconde guerre… ». On vole haut avec Jean-Luc M.) .
Dans la salle, José Bové a commencé son plaidoyer pro-européen (je ne le savais pas si pro-européen) et je suis prêt à l’applaudir. Comment nier que si nous voulons en effet résoudre des problèmes aussi complexes et vitaux que l’énergie et les transports, nous devons aller vers plus de coordination européenne ? « Utopie que tout ceci », lui rétorque le « réaliste » Védrine. A quoi cela sert-il de s’échiner à proposer des solutions dont de toutes manières les peuples ne veulent pas ? Comment réaliser ce que voudrait Bové (une place prépondérante donnée au Parlement Européen, qui choisirait lui-même les membres de la commission) alors que la légitimité actuelle est du côté des parlements nationaux et qu’on n’imagine vraiment pas ceux-ci se dessaisir de leur souveraineté ? Et en plus imaginer que vingt-sept parlements nationaux suivent cette voie ensemble… avec en plus les possibilités de référendum etc. Utopique, impossible à réaliser. Héroïque, Bové résiste. Il montre ce que l’Europe peut nous apporter… sur le plan de la démocratie même, saluant au passage le travail accompli par la Cour Européenne de Justice, forçant le gouvernement français à prendre en compte des sujets comme les prisons françaises ou la non indépendance des procureurs. Un million deux cent mille signatures : c’est le résultat de la pétition contre les OGM qu’il a présentée, avec d’autres, au membre de la Commission européenne responsable de ce dossier. Il sait que, même si la loi européenne n’est pas encore sortie sur le sujet de la prise en compte des pétitions, celle-ci aura un effet : elle sera prise en compte, d’une manière ou d’une autre. On est loin du mépris affiché en France à l’égard des millions de citoyens qui ont manifesté cet automne et cet hiver contre la réforme des retraites… Védrine est beau joueur mais il souligne que cette Cour Européenne, ce sont les gouvernements nationaux qui l’ont bien voulu, elle n’est pas tombée du ciel, ni d’un vote des parlementaires européens… Et pour lui, tout ne peut se faire que de cette façon.
Ensuite questions de la salle, baroud d’honneur de ceux qui veulent encore y croire, sursaut teigneux d’une dame qui a mal compris (ou feint de mal comprendre) Bové car pour elle « Europe » est uniquement synonyme d’attaque aux services publics (alors que les attaques, en l’occurrence, un seul gouvernement national, l’actuel, est bien capable d’y procéder à lui tout seul…).
Débat riche, certes. Un peu ennuyeux aussi, certes. Et qui laisse un drôle de goût : le réalisme est-il à ce point l’option obligatoire ? Quand on a entendu ces jours-ci les experts du Moyen-Orient nous affirmer avec conviction que la situation en Egypte n’avait rien à voir avec celle de la Tunisie, que là, l’armée était complètement à la botte du régime et que les manifestants n’étaient qu’une minorité, et qu’on voit ce qui est en train de se passer… on peut se demander si les « réalistes » ne sont pas parfois pris de court…
Autre sentiment, un peu contradictoire avec le précédent : et si, dans le fond, tout n’était pas comme ça, je veux dire : à double détente, tenir, d’un côté, un discours volontariste pour que les choses changent, alors qu’on sait que, de l’autre, elles ne changeront pas autant qu’on le souhaite, mais que sans ce discours, elles changeraient encore moins dans le sens qu’on souhaite ? La politique n’est-elle pas inscrite dans cette dualité, qui est aussi une duplicité ? N’est-ce pas là, même, la loi du politique ?
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« Dans un projet politique comme dans un tableau, il y a ce que veut l’artiste et il y a ce que peut l’époque. » C’est de Régis Debray, dont je suis loin d’être un fervent admirateur, dans l’excellent petit livre « A un ami israélien », suivi de la réponse subtile et profonde d’Elie Barnavi. Peut-être ferai-je un billet dans mon blog sur ce livre.
En attendant, je trouve que cette phrase corrobore ce que tu exprimes dans ton billet. Éternel fossé entre réalisme et volontarisme.
N’oublions pas que la politique est l’art du possible. Et que rien de ce qui est prévu n’arrive jamais.
Il est tard, je devrais aller me coucher …
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J’ai suivi pendant ce temps le débat entre Alain Bauer et Jean Pierre Havrin qui expérimenta la police de proximité à Toulouse, « Police contre polis »; je prendrai un moment pour en tirer quelques réflexions, c’était intéressant. Mais pour l’instant, il faut que j’y retourne, il va être question de « l’eau les vrais enjeux de 2012 » et de « la république des relégués », sans trop de professionnels de la politique. merci pour votre compte-rendu.
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@ Chassigneux : Alain Bauer, ce type (ancien maître du Grand-Orient), « consultant » en stratégies sécuritaires et porte-parole masqué de la politique d’Hortefeux : à fuir, par pitié !
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Et oui, on vole haut, et même très haut avec Jean-Luc Mélenchon, brillant politique ! Et que ces journalistes lâches des médias de masse osent organiser des débats comme celui-là, avec cet intellectuel candidat à la présidentielle, sur les grandes chaînes de télévision, et on verra ! Rira bien qui rira le dernier ! Vive la République !
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@Lily: j’espère que vous n’en êtes pas au stade du Culte de la Personnalité, quand même…
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Je suis souvent étonné de l’adhésion que suscite Mélenchon parmi ses partisans. Se forgeant un personnage qui a raison seul contre tous, se déclarant être celui qui rendra le pouvoir au peuple, il entraîne des réactions d’adulation qui me laissent perplexe. Cela me fait penser à une analyse parue dans le dernier numéro de « Books », sur « L’hyperdémocratie de Chavez », description très fine de la façon dont un homme charismatique fait de l’admiration de lui-même un principe de gouvernement. Mélenchon, le Chavez français ? Heureusement qu’il ne sera pas élu !
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