Critique de la critique: la science est-elle une construction fétiche?

Après « comment agir dans un monde dominé par ce qui a un prix », inpiré des philosophes de la tendance critique, Adorno, Kurz ou Postone, mon lecteur ou ma lectrice pourrait penser que je m’arrêterai là, validant toutes les thèses de ce courant. Ce n’est pas si simple. Nul n’a la vérité entièrement pour soi, même si elle est délivrée de manière négative. C’est un pas que nous franchissons quand nous comprenons que toute vérité présentée de manière positive nous enferme, que toute totalité affirmative conduit au totalitarisme. Seulement la négation ne peut s’exercer que s’il y a déjà des éléments positifs. Dans la langue ordinaire, la négation n’est jamais première. Dire que le ciel n’est pas bleu, c’est toujours répondre à un locuteur qui a prétendu qu’il l’était, bleu.

Affiche annonçant une conférence de Grothendieck en 1972 au CERN

Ainsi, après avoir suivi l’exposition de la démarche de Robert Kurz, partisan d’une pensée critique qui s’attaquerait aux catégories mêmes du capitalisme et donc au fondement de ce que notre volonté d’interpréter le monde érige comme tentative de solution naïve à la contradiction fondamentale, il nous faut marquer un temps d’arrêt, nous reposer en quelque sorte (d’une prose le plus souvent indigeste surtout quand elle réside dans une laborieuse traduction de l’allemand au français, épousant les longues tournures à base de nominalisations qu’affectionne la langue de Goethe quand elle tombe aux mains des philosophes) et ce faisant nous demander si nous sommes prêts à accepter en bloc l’ensemble des critiques kurziennes, y compris quand elles prétendent s’appliquer à la science. J’ai déjà exprimé une forme de doute en insinuant qu’à voir partout des rapports-fétiches, on risquait de sombrer dans le nihilisme. Mon doute devient plus fort encore quand la théorie, décidément très ambitieuse, veut s’en prendre à la science. Ainsi, Kurz dans Gris est l’arbre de la vie… après un passage où il voue toute théorie sociale au domaine pur et simple de l’idéologie (car reposant sur une distinction structure / action qui ne peut être que ramenée à un effet du patriarcat producteur de marchandises moderne) ajoute : Même les sciences de la nature sont elles-mêmes finalement soumises à ce caractère idéologique, en ceci qu’elles aussi sont liées à la constitution-fétiche sociale et ne peuvent de ce fait qu’être aussi peu « impartiales » que la théorie sociale. Il va de soi que ce genre d’affirmation doit être prouvée avant d’être assénée. Selon Kurz, Marx aurait distingué (à tort semble-t-il) idéologie et scientificité, en se contentant de comprendre celle-ci comme simple réflexion « impartiale »… cela est bien pauvre comme pensée épistémologique. Si la science se définit comme simplement impartiale, encore faudrait-il définir qui sont les partis… La conception ressemble ici à cette vision médiatique selon laquelle on serait dans la science à partir du moment où on équilibre la présence des pour et des contre. Evidemment, il n’en est pas ainsi. Et si la science se distingue de l’idéologie ce n’est pas en vertu d’une « impartialité » voire même d’une « objectivité » qui reste un concept vague mais en vertu de l’existence de montages expérimentaux extrêmement complexes qui permettent de décentrer les observables par rapport au point de vue d’un observateur (ceci s’applique même aux mathématiques comme l’avait montré en son temps un certain Pierre Raymond qui avait écrit un livre intitulé Le passage au matérialisme, paru chez Maspéro dans les années 70. Les théories mathématiques, les théorèmes etc. sont aussi les produits d’une pratique qu’on peut qualifier « d’expérimentale » en ce qu’ils sont sans arrêt soumis à l’épreuve de tests logiques qui ne dépendent pas de l’écrivant).

La critique de la science n’est pas nouvelle. Elle imprègne le marxisme traditionnel, tout autant que la philosophie spiritualiste ou l’école de Francfort, sans parler bien sûr de Heidegger qui en a fait son fond de commerce. Nous connaissons la malheureuse affaire Lyssenko, triste épisode où Staline avait cru démolir la « théorie bourgeoise » de l’hérédité énoncée par Mendel parce qu’elle était bien peu conforme au dogme marxiste traditionnel. A la place, Staline avait rendu tous les honneurs à un obscur ingénieur qui voulait ensemencer la Sibérie grâce à des méthodes de culture alignées sur le matérialisme dialectique. D’où résultèrent échec désastreux et famine. Il faut croire que ce vieux démon fait régulièrement surface dans les remous causés par la réflexion autour des idées de Marx. Pourtant, nous rappelle bien Kurz, il y eut un Marx qui reconnaissait la valeur de la science. Mais c’était « le mauvais Marx » (!), le Marx « progressiste », celui qui était encore sur le versant de la modernisation, n’ayant pas opté définitivement pour l’analyse du fétichisme. Car bien sûr, on l’a compris, la science n’est que l’hyperdéveloppement d’un aspect de la contradiction capitaliste, celui qui mène aux hausses de productivité et donc à la rentabilité du Capital. Vu comme ça, en effet, on ne voit pas pourquoi on s’agite tant dans les labos. Après tout, à quoi servent les vaccins, à quoi sert la recherche médicale, autant tous crever. En plus ce sera en parfaite conformité avec le slogan kurzien de « grise est la vie », tellement grise qu’elle ne vaut pas le coup d’être vécue. L’avantage du discrédit porté a priori sur la science est bien connu : il permet à bon compte d’éloigner toute objection sérieuse comme émanant d’une vision positive voire positiviste.

Avoir une vision critique authentique de la société c’est aussi en avoir une de la science et de la connaissance, ce n’est pas nier la science comme simple reflet de cette société, car elle ne l’est pas, contrairement à ce qu’aimeraient penser, par souci de simplification, certains philosophes critiques qui n’ont en réalité que peu de connaissances scientifiques et, encore pire, peu de connaissances mathématiques, et donc pas de connaissance authentique de l’histoire des sciences et particulièrement des mathématiques. Ils n’ont pas lu Cavaillès, le grand philosophe-résistant – dommage pour eux car ils percevraient une conception du rapport de la théorie à la pratique qui leur échappe complètement – auteur d’essais d’une grande profondeur sur la logique et sur la science, sur Cantor et les transfinis et qui montre à quel point la Science est plongée dans une histoire, elle aussi, mais une histoire du Concept. Cette histoire-là n’affleure que tendanciellement avec l’histoire globale, elle n’a presque rien à voir avec le Capital (même si par instant, on doit bien reconnaître une influence sous l’emprise d’intérêts extérieurs, mais ce ne sont que des intérêts extérieurs, il n’y a aucune urgence à prouver la conjecture de Goldbach, même si parfois, un peu, il y en aurait une à prouver que P ≠ NP – car cela est vital pour le fonctionnement des banques – mais c’est juste un moment de rencontre tangentielle, savoir que P ≠ NP est vital en soi pour les mathématiques elles-mêmes).

Prenons l’exemple de la logique que je connais (à peu près!) bien. Il y a plusieurs façons de la considérer : un regard lointain et superficiel peut en faire une auxiliaire de la science positiviste et du capitalisme (voire du « libéralisme »), une étude plus serrée verra là au contraire un terrain inévitable de recherche, ouvert à la critique et pas seulement à « l’affirmation », inévitable car, bien sûr, on ne conçoit pas d’avoir quelque discours que ce soit qui ne se fasse avec un souci de cohérence, d’enchaînement des idées, de prévision des objections, ni d’un certain sens de… la contradiction ! Tout le monde sera d’accord, je crois, pour admettre qu’il n’est de connaissance véritable que de démonstration. Il est vrai que la logique dite classique a prétendu s’imposer comme carcan de la pensée, elle a colonisé une certaine philosophie, qu’on a qualifiée d’analytique, et que cette entreprise était lancée sous les auspices du positivisme le plus radical. La bataille des idées est omniprésente : si nous voulons exercer notre puissance de négativité, il faut qu’il y ait eu préalablement quelques affirmations positives. Je ne blâmerai pas de manière brutale les logiciens du XIXème siècle, les Frege et les Russell (qui servent de base à la philosophie analytique), car sans eux, la critique qui s’en est suivie n’aurait pu se faire. Or on sait qu’après eux, un large mouvement de contestation s’est produit, dont les grands noms furent ceux de Gödel et de Turing, surtout connus pour leurs théorèmes montrant que les grands systèmes n’arriveraient jamais à tout couvrir dans l’ordre de la connaissance (Gödel en montrant l’incomplétude de tout système qui prétendrait simplement contenir la théorie des nombres entiers, Turing en montrant les limites de la notion de calculabilité – il est même impossible d’écrire un algorithme qui permettrait de prévoir si un programme informatique va bien s’arrêter!). Si on veut aujourd’hui poursuivre cette avancée théorique, c’est en prenant en compte ces résultats de façon honnête et loyale, ce qui signifie qu’on ne va pas les extrapoler de manière excessive, à la manière de pseudo-épistémologques du genre de Dominique Bourg prétendant que toute connaissance est impossible et qu’aucun théorème n’est prouvé (cf. conversation avec lui à Morges en 2021) etc. Tous les théorèmes que nous connaissons sont réellement prouvés. Il existe seulement des assertions qui demeurent conjecturales, ainsi que des énoncés dont on a pu prouver qu’ils étaient indécidables. Prendre en compte de manière loyale les résultats obtenus par Gödel et Turing signifie simplement que l’on ne doit pas faire comme s’ils n’existaient pas en se retranchant dans le fantasme théorique d’une théorie complète quand on sait qu’elle ne peut pas l’être, fantasme qui accompagne volontiers ce qu’on nous vend comme Intelligence Artificielle, qui n’est en aucun cas une intelligence.

Fac similé de notes prises par Alexandre Grothendieck au cours de son long hermitage dans l’Ariège, dont on se demande bien ce que le capitalisme pourrait faire

La logique et les mathématiques ont fourni à l’esprit contemporain une multitudes d’objets théoriques et de raisonnements qui n’ont rien à voir avec le maintien du capitalisme : ils ne feraient plutôt bien souvent que le menacer car c’est ce dernier qui est incapable d’intégrer les idées produites. Comment peut-il comprendre l’idée de transfini ? Comment peut-il seulement fournir une approche « rentable » d’une C-algèbre ou d’un topos de Groethendieck ? Le capitalisme retire certains aspects « affirmatifs » de la science, comme la possibilité d’écrire des algorithmes facilitant ou remplaçant certaines tâches, mais il n’en avale jamais les éléments critiques. Or, ces élements constituent le réel, ce sont eux en effet qui marquent les bornes, les obstacles infranchissables par une subjectivité avide, ce sont eux qui font sans arrêt retour lorsqu’on croit s’en être débarrassé pour adopter une attitude « libérale » (transiger avec les principes). Qu’il soit impossible d’avoir une théorie complète de l’arithmétique (et donc a fortiori de tout domaine qui la contient) voilà un élement du réel. Une borne. Un obstacle infranchissable. Cette impossibilité est à l’image de celle qui est brandie au-dessus du capitalisme : son impossibilité de fait, à continuer de se reproduire indéfiniment.

En rejetant la science sous la dénonciation globalisante qu’elle serait par essence positive, affirmative et non critique, les adhérents à la pensée de Kurz se privent de son contenu critique.

Et c’est quand même un comble, qu’une théorie se disant critique rejette des contenus authentiquement critiques pour le simple plaisir de se complaire dans les limites d’une théorie qui finirait bien peut-être un jour par devenir… positive.

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10 Responses to Critique de la critique: la science est-elle une construction fétiche?

  1. Avatar de W. E W. E dit :

    Je suis assez sceptique sur le lien que vous semblez établir entre certains résultats des sciences formelles et le système économique capitaliste.

    Vous écrivez : « La logique et les mathématiques ont fourni à l’esprit contemporain une multitudes d’objets théoriques et de raisonnements qui n’ont rien à voir avec le maintien du capitalisme : ils ne feraient plutôt bien souvent que le menacer car c’est ce dernier qui est incapable d’intégrer les idées produites. »

    J’ai cru lire du Badiou.

    Quel réel lien y aurait-il entre des résultats de mathématiques fondamentales et un système économique ? S’il s’agit de dire que la rentabilité économique capitaliste ne peut s’appliquer à certains résultats mathématiques, c’est un truisme. Je ne suis pas certain qu’un autre système économique ferait intrinsèquement mieux en la matière, pour la raison simple qu’on a affaire à deux choses incommensurables, c’est-à-dire reposant sur des évaluations hétérogènes. Certains résultats mathématiques sont très importants pour les mathématiciens, sans qu’on puisse les traduire par des technologies ou autre gadgets. D’autres, comme vous le soulignez, peuvent apparaître au contraire comme très intéressants pour les divers investisseurs, car ils y voient un intérêt économique. Mais ce problème d’évaluation se poserait également (peut-être de manière moindre) en régime socialiste. Je ne suis pas sûr que les topos de Grothendieck soient plus intéressants pour le socialisme que pour le capitalisme.

    S’il s’agit de dire que la logique du gain fait souffrir la recherche fondamentale en mathématiques, cela me semble en effet pertinent. Mais tout ceci s’explique de manière économique et sociologique assez simplement. L’idée (implicite) qu’il y aurait des connaissances mathématiques « dérangeantes » pour le capital, car « non-intégrables » (on se demande ce que cela peut bien vouloir dire), est assez obscure, et me rappelle les vertus dormitives de l’opium.

    Il y a un certain type de vérités scientifiques qui ont, me semble-t-il, sans doute plus de portée critique que les mathématiques ou la logique quant au « capitalisme ». En voici quelques-unes :

    (1) Certains résultats négatifs de la théorie de l’équilibre général en économie, comme le théorème de Sonnenschein (mais peut-être ne daignez-vous pas reconnaître une scientificité à l’économie mathématique)

    (2) Les diverses prévisions du modèle World3 utilisé par la team Meadows (mais peut-être ne s’agit-il là que de science appliquée ?)

    (3) La baisse tendancielle du taux de profit (mais peut-être s’agit-il ici du « mauvais » Marx scientiste du capital).

    (4) L’extension indéfinie de la sympathie et des instincts sociaux permettant la civilisation (exposée par Darwin dans la Filiation de l’Homme).

    (5) L’incapacité des marchés à fournir des prix contenant l’information pertinente, et, par là, la supériorité rationnelle de la planification économique.

    Évidemment, ce sont, mise à part la première, des connaissances qui ne sont pas démontrées mathématiquement. Selon votre critère, elles ne sont pas des connaissances véritables. À ce compte-là, il n’y a de véritables connaissances que mathématiques. C’est une conclusion qui me semble assez problématique du point de vue épistémologique.

    bien à vous,

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    • Avatar de alainlecomte alainlecomte dit :

      Merci pour votre commentaire. Je suis heureux quand un de mes billets suscite des réactions même sous la forme d’une critique. Ce billet est surtout une réponse aux arguments qui peuvent parfois être avancés dans le cadre de la théorie critique, notamment par les tenants de la critique de la valeur, comme Kurz et Postone. Kurz en particulier, dans son radicalisme, a tendance à mettre toutes les productions humaines qui se sont produites sous la période capitaliste (savoir bien sûr quand elle commence…) sous la catégorie de constitution fétiche. Elles émanent en quelque sorte de la forme de conscience engendrée par le capitalisme. Je crois que cela peut s’appliquer aux sciences sociales, où de nombreuses catégories (à commencer par « l’économie », mais aussi la façon dont ont été baptisées les principales structures sociales, famille etc.) peuvent être vues comme catégories fétiches et, dans ce sens, la position critique de ces courants qui vise à une critique catégorielle du capitalisme (et non à une simple critique de l’économie politique) s’y attaque. Mais quand je lis que cela s’étend aussi au domaine des sciences de la nature, qui auraient une ossature idéologique elles aussi, cela me fait un peu bondir. Je mets les maths dans le lot bien qu’à vrai dire je n’aie pas lu jusqu’ici de critique aussi radicale pour l’instant me semble-t-il bien que la logique soit l’objet de telles attaques de la part des courants de l’Ecole de Francfort, Adorno en particulier. J’ai donc voulu dire que ce n’était pas si simple, que la science, et en particulier la logique et les mathématiques ont elles-mêmes leur dimension critique. Pour beaucoup de gens, les maths se ramènent au « quantitatif », lequel « quantitatif  » est la base à partir de laquelle peut se développer le capitalisme. Quant à la logique, elle serait une mise en forme d’une rationalité utile pour ce même développement. Cela est pertinent pour certains aspects des mathématiques appliquées bien sûr et pour l’usage à mon avis idéologique que certains philosophes font de la logique dans le cadre de la philosophie analytique. Mais les maths comme la logique débordent largement ce cadre, elles contiennent des résultats qui sont critiques en eux-mêmes. Un bon exemple: le théorème de Gödel empêche le développement du fantasme de l’intelligence artificielle laquelle se développe aujourd’hui dans le sens de la valorisation du capital. IL y a donc des résultats « indigérables » par le mouvement du capital, au sens où il n’en tirera jamais partie et où, même, ils sont comme un caillou dans sa chaussure. Cela n’a rien à voir avec les résultats que vous évoquez, qui ne sont que des critiques que sûrement le capitalisme peut contourner, qui font partie de ce que Kurz nomme une interprétation de la contradiction (mais pas une remise en cause radicale). Vous dites que vous avez l’impression de lire du Badiou, mais cela ne me choque pas. Je suis critique envers les positions politiques de Badiou, mais j’apprécie sa réflexion épistémologique, qui veut faire des mathématiques pures la vraie « ontologie » du réel. Je lui reproche seulement d’avoir fait comme si les maths s’étaient arrếtées à une certaine époque, se basant uniquement sur la théorie des ensembles, alors qu’il y a bien d’autres choses qui ont été créées depuis. IL y a beaucoup d’autres gens que moi qui font cette critique d’ailleurs. On en vient toujours à Grothendieck… 🙂

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      • Avatar de W.E W.E dit :

        Merci pour cette clarification !

        Je dois dire que les vérités que j’ai listées me semblent beaucoup plus critiques que les résultats d’incomplétude de Gödel. Je crois que, mis à part quelques individus pas très au point là-dessus, les gens se contre-fichent de savoir si on pourra un jour répondre à « tout ». Je crois que ce fantasme du totalitaire n’existe que chez quelques-uns, et il me semble largement à côté du problème massif que pose la logique socioéconomique capitaliste. Peu importe (me semble-t-il !) que l’intelligence artificielle ne soit pas une « vraie » intelligence, à partir du moment où elle sera capable de produire quelque chose de beaucoup plus pertinent que la très grande majorité des bouses que produisent les humains travaillant dans une industrie comme Hollywood. Les investisseurs n’ont pas le fantasme d’un système totalitaire, ils ont simplement le désir de voir leur porte-feuille s’agrandir. La position qui prétend prendre de la hauteur en s’appuyant sur des résultats mathématiques pour formuler un constat d’impossibilité concernant des événements sociaux me laisse toujours dans l’embarras. C’est, me semble-t-il, trivialement vrai, et ainsi hors-sujet.
        En revanche, montrer que la logique économique capitaliste conduit à de grand gaspillage, montrer qu’elle nous conduit à franchir des frontières et heurter des limites, montrer que la civilisation repose sur des conduites qui sont diamétralement opposées à la loi de la jungle de la compétition économique, voilà des résultats qui me paraissent bien plus critiques – car directement appropriés – que les topos de Grothendieck ou la géométrie non-commutative (merveilles scientifiques qu’il faudrait bien évidemment exposer, dans le cadre d’un régime politique différent, sur les chaînes télés aux heures de grande écoute).

        Concernant Badiou, j’avais bien lu vos notes. Je suis toujours frappé quand des personnes savantes, plutôt portées sur les sciences formelles il est vrai, me disent trouver ce genre de chose intéressant. D’une certaine manière, cela l’est pour moi (qui en ai beaucoup lu à une époque), mais simplement comme de la poésie conceptuelle. Ce qui est un grand compliment que cette oeuvre ne mérite peut-être pas.
        Pour le reste, des mathématiciens (comme R. Scruton, P. Shapira), des philosophes (A. Barberousse, P. Huneman, P. Engel) et des sociologues (M. Joly, A. Saint-Martin) ont dit à mon sens l’essentiel. C’est une philosophie qui repose entièrement sur la métaphore et qui ne parle de rien (à la manière des anciens métaphysiciens et, plus proche de nous, de Heidegger). Je ne suis pas sûr que ce soit faire justice à la théorie des ensembles et des catégories que de les enrégimenter dans un discours mystique servant essentiellement à justifier des positions politiques et morales propres à leur auteur.
        Sur ce genre de choses, je crois que l’article le plus pertinent, incisif, drôle et court, a été écrit par le sociologue L. Pinto : « Y a-t-il quelque chose à comprendre ? »

        Bien à vous,

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  2. Avatar de Michel Asti Einomhra Michel Asti dit :

    Lire certains textes apporte une forme certaine de délectation. Notamment lorsque la logique langagière autorise un débat versé aux meilleurs formes d’humanisme, dénuée de partialité néfaste à la communication.

    Bien à vous

    Libre à nous ensuite d’étiqueter les cases si cela nous chante, mais cela n’aura rien changé à la règle du jeu, ni aux stratégies que l’on peut élaborer. Parler de lieux, de localités donc (de loci comme on dit aussi dans le vocabulaire de la ludique), cela résonne étonnamment bien à l’heure où les identités sont trop souvent mises en exergue, ruinant et minant l’espace social.

    On retrouvera ici un passage du livre récent du groupe réuni autour de Bernard Stiegler (Bifurquer)…̚

    Une localité n’est pas une identité. C’est au contraire un processus d’altération constitué de localités plus restreintes et multiples, et inclus dans de plus vastes localités.

    Ou encore : …̚

    La localité est le moteur de la différence elle-même ; elle n’est pas constituée par son identité (elle n’en a pas) mais par son potentiel de différenciation […]. La différence est première, c’est-à-dire primordialement liée à une autre différence plutôt qu’à l’existence d’une identité préconstituée. C’est l’évitement des cycles et circularités qui fondent la logique. Cela ne veut pas dire que cycles et circularités soient bannis, interdits de cité, voués aux gémonies, de même que les réseaux qui divergent ne sont pas des démons dont on ne veut rien savoir, simplement ils n’entrent pas dans la logique, ils dépendent d’un ailleurs sur lequel il est difficile de construire…

    Bien sûr qu’il y a une nature humaine et un esprit critique en chaque individu en capacités de formuler ses idées dans un langage logique, propre à entamer un débat versé aux formes d’universalité conformes à un imaginaire apte à définir les besoins communautaires et territoriaux. Elle se distingue bel et bien en tant que nature vivante, de tout ce qui vit. Qu’une propriété unique dans tout ce qui vit, caractérise : la conscience d’être, savoir – pour tout humain – que l’on peut émettre des idées, que ce savoir soit conceptualisé, réfléchi, ou seulement ressenti et non interrogé. Ainsi, puisque Spinoza eut évoqué, que tout être veuille persister dans son être, caractérise le vivant, donc aussi l’humain, sans que cela le spécifie. Ce qui le spécifie en tant que conscience est l’étonnement de ce qui est, de ce qui se passe, de ce qui dans ce qui est et dans ce qui se passe le concerne lui-même, tout en cherchant continuellement sa propre position physique et mentale au rapport du monde réel, voire des différents espaces qu’on se crée. La pensée traduit ces ressentis organiques, corporels associés aux ressentis mentaux, de la sensibilité, de la perception qui génère une structuration d’ensemble comme particulière des choses, qui se modifient imperceptiblement par les liens et les effets que les choses entretiennent les unes avec les autres. La culture met en évidence qu’au fur et à mesure que l’humanité progresse dans l’interrogation des choses, grâce notamment à sa faculté de discernement et d’imagination intellectuelle, par lesquelles elle s’est créée des instruments concrets d’investigations et de réalisations pratiques, l’humain cultivé aurait à adopter une distanciation mentale à l’endroit des savoirs et une éthique comportementale par laquelle sa dignité à l’égard de soi-même est respectée. Car tout humain n’est pas interchangeable ou alors rien que pour ceux qui y souscrivent, mais unique pour tout un chacun qui constate que le monde est bel et bien le sien.  Même s’il est rempli d’autres, plus ou moins masqués sous toutes les latitudes, nous dit-on, par les temps qui courent.

    Si le potier n’haïssait le potier,

    Si l’architecte « Sis » l’architecte,

    Si l’impérieux ne travestissait les vagabonds de mots

    S’ils ne t’ont pas tout dit

    Si leurs mots ne t’ont pris

    Entre tristesse et joie.

    Telles les ombres du silence

    Semant quelques cailloux

    Entre chênes et roseaux

    N’oublie pas leurs brûlots.

    S’ils t’ont craché du feu

    Comme des dragons furieux

    Soufflant sur tes douleurs

    Figures de démons nus.

    Corps tremblant de peur

    Cœurs percés de tisons

    N’oublie pas leurs brûlures.

    S’ils se sont affaiblis

    Par trop de rêves perdus

    Sous des pulsions vides.

    Dans l’ondée piquante

    Sur des versants gelés

    Avec les oiseaux du vent.

    Si tu les pensais fous

    N’oublie pas les mots dits

    Ceux des poètes vagabonds…

    Si le chanteur entendait le saltimbanque,

    Si le poète dessinait Callippos…

    Écoute au lointain le murmure

    Celui qui jamais ne vacille

    Souvent tu sous les rouleaux du temps

    Parfois surgissant de l’orée.

    Tends l’oreille aux vents élevés

    Ceux qui soufflent sur les brumes

    Bercés aux frontières du prime âge

    Tantôt au faîte de vieux chênes

    Comme ces nuages aux pointes des monts

    Signature des tourments liquides

    Une encre brûlante trace les songes

    Stylet lys des désirs impatients.

    Vision d’une rencontre émerveillée

    Celle que vêtent les lèvres charmeuses

    Variations d’un chant octroyé

    Celui sauvegardé des outrages.

    Verve aux habits de mémoire

    Résonance aux solstices d’été

    Ton visage parle aux éphémères

    J’en écoutais ton tendre délire.

    Celui qui parlait aux livres

    Demeure des feuilles légendaires

    Présence des mots de liaison

    J’en assumais mes propos découverts.

    Sont-ce là les engagements aventureux ?

    Entends le bruit des traces sûres

    Pas coquins couvés de passions

    Le futur fut attisé de résurgences

    Notre jeunesse n’y prit garde.

    Fut-elle ficelle d’infortune ?

    Jeux épars aux lieux des rumeurs

    Ceux au prisme sans amarres gravées

    Où les fontaines parlent de libertés

    Comme les enfants d’innocence

    Image d’un ancien feu follet

    Il y resta longtemps silencieux

    Là où le sens fait dignité

    Au nom de la veille parentale

    Respire la colonne de nos ères

    Attentions portées à la source

    Vigie aux sincères passants(es)

    La parole est une étrangère.

    Écoute à l’ombre des muses

    Ce qui manqua aux frasques du temps

    Ces séductions en pouvoir d’attraction

    Afin que les poètes peignent leur Calliope ;

    Leurs clés luisent à un jet de pensées…

    Si le saltimbanque dessinait le reflux,

    Si le peintre écrivait la folie,

    Si l’orgueil écoutait la modestie,

    Si la discursivité était pluridisciplinaire,

    Si l’intuitivité était moins dédaigneuse,

    Si le discours était moins autocentré…

    Si l’art signifiait la tare,

    Si la science pesait la position…

    Et ce temps… à vivre ?

    […]-[…]

    . Et en d’autres lieux terrestres quelques attentions permettant de croire à certains ‘’esprits humains’’ observant ce qui passe dans le monde fourbi aux désirs infinis et de tout ce qui peut rester des heurts, des mots et des silences…

    Sloterdijk, plus de cinquante ans après Heidegger, reformule le constat d’échec de l’humanisme. Pour lui, comme le mentionne la citation mise en exergue, l’humanisme explicite le fait que « les hommes sont des ‘’animaux sous influence’’ […] [dans] la bataille permanente pour l’être humain qui s’accomplit sous la forme d’une lutte entre les tendances qui bestialisent et celles qui apprivoisent. » Force est de constater que les forces qui bestialisent, qui désinhibent, dominent les médias contemporains.

    Le paradigme du pain et des jeux de Juvénal semblent triompher dans la culture de masse. Depuis l’avènement des nouvelles techniques médiatiques du siècle dernier, les médias traditionnels d’inspiration humaniste se trouvent largement dépassés. Pour cette raison, « les grandes sociétés modernes ne peuvent plus produire que marginalement leur synthèse politique et culturelle par le biais des médias littéraires, scientifiques, épistolaires et transmissions en volontés et statuts judicieux. » La question centrale devient alors : « qu’est- ce qui apprivoise encore l’être humain lorsque l’humanoïde – automate, échoue dans son rôle d’école de l’apprivoisement humanisant la société tout entière ? » Comme le fait remarquer Sloterdijk, l’analogie zoologique est présente dès les débuts de la philosophie politique occidentale. Platon présente ainsi le roi comme le pâtre d’un troupeau d’animaux sans cornes! Nous comprenons alors facilement pourquoi Sloterdijk parle de parc humain et de domestication. L’art pastoral décrit par Platon constitue un aspect de ce que Sloterdijk nomme une anthropotechnique. Concept central de cet auteur, il « désigne un théorème philosophique et anthropologique de base selon lequel l’homme lui- même est fondamentalement un produit et ne peut donc être compris que si l’on se penche, avec un esprit analytique, sur son mode de production. » C’est donc une étude de la production de l’humain, de l’anthropogenèse, qu’il propose d’effectuer. C’est alors qu’il faut invoquer Heidegger pour rappeler que l’Homo sapiens est un étant qui se tient dans la clairière. « Or seule cette clairière est ‘’le monde’’. » Précisons que, là, conformément à l’étude de l’écologie, la clairière est le monde humain, non, totalement, éloignée de l’environnement animal.

    Les humains vivent dans le monde, la culture, et les animaux dans la nature. Dès lors, puisque nous savons pertinemment que c’est l’humain qui est responsable du monde terrestre, nous saisissons que c’est l’Homo sapiens qui crée, avec les langages, la philologie, les sciences, les arts et la sémiologie, la clairière tout comme c’est l’anthropotechnique qui fait l’humain observateur de son milieu.

     Mais même si nous statuons que c’est l’Homo sapiens qui constitue le monde, encore faut-il savoir comment l’Homo sapiens est venu au monde, c’est-à-dire qui effectue l’anthropotechnique, comment l’anthropogenèse a-t-elle débuté ?

    Répondre simplement que c’est l’humain lui-même qui en est responsable serait présupposé la présence de ce que l’on cherche. La réalité est justement celle-ci : quelque chose d’animal, fermé par les sensations, est instinctif, quelque chose de pré-humain devient humain; quelque chose de pré-mondial devient sensible à la totalité et compétent face à la vérité du réel et évolue comme constituant du monde Dans ce sens sémantique, ‘’clairière’’ et ‘’devenir être-humain’’ ne serait que deux expressions désignant la même chose.

    Mais est-il réellement possible de s’assujettir volontairement ?

    N’est ce pas cela précisément que l’autonomie ?

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    • Avatar de Debra Debra dit :

      J’ai ouvert le « Phaedre » de Platon il y a quelque temps, et suis restée scotchée par l’introduction de ce dialogue que j’attends l’été pour lire en entier. Un cadre… pastoral pour le « Phaedre », et pas n’importe lequel. Un cadre où Platon mentionne avec ironie et mépris, les petits penseurs qui renvoient toute forme de croyance (et de foi) à une affaire de dupes, pour des dupes. Pour un peu, il parlerait de petits scienteux…

      J’ai été émerveillée par ce cadre pastoral, car il m’est apparu que même à cette époque assez lointaine pour notre civilisation… de l’écrit, on peut voir une nostalgie pour le pastoral, qui implique, vous devez le savoir, le… pasteur, le bon pasteur, le bon berger, (même, Alain, le… patriarche, désolée). Se peut-il que les Athéniens, à cette époque, étaient déjà la proie de ce qui nous agite à une grande échelle en ce moment ? La sensation ? (l’idée ?…) d’un éloignement d’avec un rapport mythique direct avec une nature à opposer à « civilisation », surtout civilisation URBAINE ?

      Le jardin est un lieu intermédiaire pour l’Homme. Il y agit avec une main de maître. Mais ne garde-t-il pas inscrit en lui quelque part ce nostalgique désir de ne pas maîtriser ? Ne garde-t-il pas, de manière confuse, le sentiment de tout ce qu’il perd dans et par la maîtrise ? Et y peut-il quelque chose, d’ailleurs, en dehors de regretter, quelque part ?

      J’ai banni le mot « instinct » de mon vocabulaire, pour la simple raison que je ne vois pas comment on pourrait bien différencier ce qu’on pourrait… savoir de cette manière là, et ce qu’on apprend au contact d’un environnement intérieur ou extérieur, d’ailleurs. (Je suis une bonne freudienne, encore et toujours.) Le problème de l’instinct reformule celui de l’inné et de l’acquis, et les Athéniens ont grandement souffert de cette opposition. Les oppositions binaires… font souffrir. C’est bien pour cela que le ternaire est le vrai salut… quand on parvient à le trouver. Des fois il faut chercher, mais on peut le trouver. Considérez : même/différent/semblable. Un beau… ternaire, je trouve…

      Cordialement.

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  3. Avatar de alainlecomte alainlecomte dit :

    Merci encore pour vos commentaires. mais il me faut encore dire ceci: il ne faut pas s méprendre sur mon billet (ou alors je me suis laissé aller et me suis mal expliqué), je ne vise pas à dire que les sciences et en particulier les maths sont les meilleures critiques du capitalisme (!), mais, très différemment, que leur histoire est orthogonale à celle du capitalisme, contrairement à ce que disent certains auteurs que je critique, pour qui les sciences n’auraient pas d’autre visée que d’améliorer la productivité! Il peut y avoir des points de rencontre entre l’histoire du capitalisme et l’histoire des sciences, mais je réfute l’idée qu’il y ait coïncidence. On a le droit de se moquer complètement des travaux de mathématiques pures, de penser qu’on se moque bien de savoir si la conjoncture de Goldbach est vraie ou si l’hypothèse du continu est ou non décidable, il n’empêche que ce sont des objets qui existent, et qui, à mon avis, existent indépendamment de la société capitaliste. Non, je ne pense pas que si nous étions dans une société socialiste, les choses seraient différentes, meilleures ou pires. Je rêve d’une société post-capitaliste mais je ne crois pas en une société « socialiste », on a vu ce que ça a donné d’ailleurs. En bref, paraphrasant un humoriste de par chez nous (en Rhône-Alpes), les mathématiques ne sont ni pour ni contre le capitalisme, bien au contraire!

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  4. Avatar de Michel Asti Einomhra Michel Asti dit :
    • On ne se venge pas de la vie. Juste à imaginer pouvoir, encore, passer quelques bons moments avec elle.
    • En toutes choses ; on ne reconstruit, rien de positif, sans avoir un regard, lucide, objectif et sincère, sur notre passé.
    • Un ami ne peut accepter, ‘’éternellement’’ ; la durée en destruction d’amitiés par jalousies, non-dits et perfides pensées…certaines choses ne peuvent s’oublier !
    • Il vaut mieux une vérité qui fait mal, qu’un mensonge qui dure trop longtemps. Sans colère je préfère, au mieux, partir.

    Barrières érigées par des devises gonflées aux abords de certitudes plantées à l’éphébie d’amphitryons, sans discernement quant aux sollicitudes de ne plus en avoir… comme si le plaisir de possession et de compréhension ornementale serait les uniques sens d’un jardin d’Eden imprégné du charme languissant, précieux et envoûtant bien qu’un peu désuet quant aux artifices d’une possible faveur pathétique inopportunément reléguée loin des pertinences attentionnées.

    Comme si des palissades furent détournées de la liberté d’expressions à édicter les arbitraires de vents contraires cherchant constamment à lui prétendre une impression cachée sous l’assise des indifférences où seuls existaient les iniques services rendus à son symbolisme sonné au particularisme d’avec ceux de l’image tronquée ; à la vénérer agenouillée, dans une absurdité sans teinte, plus qu’à se lever, refusant par la même les couleurs péjoratives gravitant autour d’une transparence dégradante marquetés aux signes vermifuges…

    La dignité ne se vole pas. Elle ne peut se désaffiliée de ce qu’il peut en être supposé des fraternités humaines quant à leur position au sein de l’univers tant du commencement, du milieu, de la fin, de l’infini et du tout. Elle s’acquiert par l’expérience de l’attention envers ces ‘’choses de la vie’’ entre libertés et attachements. Cette attention est le meilleur point d’équilibre pour ne pas faire preuve outrancière tant des promiscuités particulières de l’attachement envers l’autre que de la préciosité envers la liberté.

    La fraternité est personne ; mais c’est elle qui détermine les accords réunissant la liberté et l’attachement.

    C’est pour deviner, ici, que les fondements de la vérité existentielle ne sauraient être traitée hors de la matière, de l’énergie et du temps comme être sans analyse de l’idée des deux extrêmes de la métaphysique et de la psychanalyse.

    Qu’est donc ce réalisme de l’attachement absolu envers une sémiotique méta-symbolique où l’idée du milieu serait une forme d’attention envers ces ‘’choses de la vie’’ dans le monde terrestre fini fourbi au désir infini… ? Qu’elle différence de profondeur, conséquemment, entre la vérité et l’athéisme, si cette différence entre la liberté d’attachement attentionné et l’attention attachante envers la liberté est tout aussi démotivant ?

    Il est certain que le fait de considérer la hauteur ou la profondeur de l’idée d’attentions ne saurait s’exercer sans considération de ce qui peut être pensé de la substance métaphysique, distributivement prise, dans ce qui ne peut être dissocié de la sémiologie physique des idées philologiques alliée aux métadonnées de la mesure lexicographique des mots sonnés à la controverse entre convaincus(es), sceptiques et attentionnés(es).

    Il ne s’agit pas de savoir l’inintelligence, la grossièreté, l’ignorance ou la mesure d’assertion de certaines communautés ‘’humaines’’, il s’agit de définir le degré des présomptions de leurs chefs, de savoir ce qu’ils veulent, ce qu’ils pensent avoir fait – consciemment ou inconsciemment – il s’agit de savoir ou de chercher le fond, le sens et la portée de leur idéologie et connaître la méthode ou l’application quant aux résultats – obtenus ou non – et surtout savoir interpréter les intervalles vides des hommes de pouvoir comme les secrets de la poésie.

    Il nous était difficile d’entendre les vocalises de l’acceptable. Nous pouvions percevoir les coups de boutoir dans l’hystérésis généralisée. Ces harangues, en souffle perfide, couvraient la mémoire des véritables bienséances, au fil des membres innocents. Nous devinions que la sincérité des mots de transition ne serait pas en complaisance suffisante pour noyer le verbiage en rade de lèvres dissidentes, pourtant, parfois saisissantes.

    Sous le flot des regards en coin, la pauvre ignorance, en peurs perdues, flagornait en rond de facilités aux abords des portes dérobées. La lame de fond en intransigeance modale, sous affinité de songes équivoques, enflait fièrement à l’ombre des chimères clandestines et par trop cauchemardesques.

    La déréliction, aux vents malencontreux, en insécurité de mains plus légères, sous couvert de visages aux lumières éteintes, prit son intendance dans les quartiers fixés par les fantômes de la confiance.

    En béatitude sans intrigue, le démon de l’inquisition gonflait ses troupes, en fake news de fausses gardes. À ton rictus, diabolique, figé aux voix de mornes pénitences, vociférâtes en plan aux goûts d’amertume, nous préférâmes couper la ronce cachant les fragrances de la vie, quitte à entendre craquer nos os, sous la peau de nos chairs vivantes…

    La fracture de Rome n’eut sa source que dans la désunion du peuple et du sénat, quand la noblesse souleva contre elle le ressentiment du peuple, comme la vindicte populaire envers les privilèges détenus par les élites.

    […]-[…]

    L’image starisée des politiques de vernis ne sera jamais le murmure autorisant les accords du chant entre le pauvre et le riche, le maître et l’esclave, l’ordonnateur et le serviteur. Le paradoxe culturel est la faillibilité de l’épreuve matérialiste. Et dans cette incompréhension généralisée l’antivirus de la philosophie politique a été érigé par les règles du corporatisme exacerbé, du productivisme endiablé, de l’identité de la coterie, du ségrégationnisme vénère, du nationalisme paroxystique de clans identitaires et groupes extrémistes.

    Qui pouvait prévoir qu’aux portes de l’Europe, toute la haine, toute la barbarie des anciennes guerres, du XXIème siècle, en pleine période ‘’post-moderne’’ seraient sur le point d’exercer les mêmes anciens (accentués par les nouvelles technologies guerrières) ravages. Qui prévoyait et qui pouvait prévoir inversement que ces mêmes hommes ayant combattu la barbarie du nazisme seraient exactement les mêmes hommes impérieux qui exerceraient pour leur compte cette même injustice.

    Qui pouvait prévoir ce retournement de la servitude, qui pouvaient prévoir les coups de boutoir envers les démocraties, qui pouvaient entrevoir la montée des extrémismes, la réapparition des affabulateurs, formatés aux dogmes évangéliques et autres cultes voués à la destruction, tant des biens que des personnes et de la Nature, tels viles formes de néo-scientisme qui de leurs revendications de la justice ils retourneraient aux plus basses pratiques de la démagogie ? Qui pourrait répondre, aujourd’hui, de toute l’indifférence et de tant de crises ?

    Qui répondrait d’un peuple, d’un roi, des corridors de lèche-vitrines, des vendeurs de chimères, d’un homme, d’une femme, d’une mère, d’un père, des générations à venir, de l’humanité ? PERSONNE !

    L’humanité est faîte de membres mensongers, de tricheries, malversations, jalousie et de toutes les tares de la puissance destructrice des hommes et femmes de petitesse ne sachant ni rire ni pleurer, sauf à entretenir leur ‘’hôte’’ avec le cynisme suffisant au nihilisme passé et présent !

    Qu’en sera-t-il demain ? 

    Et de quoi sera-t-il fait ?

    C’est la ‘’grande chose’’ à laquelle personne ne peut répondre, ni les présomptions, ni les ambitions, ni le monde assurantiel comme celui de la thésaurisation ‘’moderne’’. Où à l’Est du nouvel Eden, lorsque les puits d’énergies fossiles auront fini de cracher leurs dernières liquidités noires, les hymnes nationaux des anciens régimes autocratiques auront cessé d’émettre les mauvais accords impropres à une possible synchronique socioculturelle, et que le petit homme sage drapé d’un sarrau blanc, avec un regard malicieux chaussé d’une paire de lunettes rondes, se sera définitivement détourné de la route du sel, car il aura compris que la destruction de celui de la vie est engendrée par les 14 milliards de pieds avançant toujours avec frénésie vers plus de consommation devenue compulsion consumériste anarchique envers Dame Nature. Et tout cela au nom du dieu de la possession au lieu d’un alléluia envers la divinité de la sagesse, où les enfants d’Irène, déesse Grecque de l’équilibre et de la réconciliation, n’auront eu que peu de persuasion à ce que la descendance de Caïn, puisse faire un déni du dogme du père leur ayant édicté : « L’infernale convoitise pousse les enfants de Caïn à s’emparer de tout ce qui est à leur portée, et comme si ce n’était pas assez qu’un seul accapare ce qui suffisait à des milliers de ses semblables, il voudrait s’y établir, lui et toute sa couvée pour toute l’éternité . Consorts frappés au sceau des diktats impérieux ?

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    • Avatar de alainlecomte alainlecomte dit :

      vous écrivez de très beaux textes, très profonds, merci de nous en faire profiter. J’aime votre réflexion sur l’humanisme. « lorsque les puits d’énergies fossiles auront fini de cracher leurs dernières liquidités noires, les hymnes nationaux des anciens régimes autocratiques auront cessé d’émettre les mauvais accords impropres à une possible synchronique socioculturelle, et que le petit homme sage drapé d’un sarrau blanc, avec un regard malicieux chaussé d’une paire de lunettes rondes, se sera définitivement détourné de la route du sel, car il aura compris que la destruction de celui de la vie est engendrée par les 14 milliards de pieds avançant toujours avec frénésie vers plus de consommation devenue compulsion consumériste anarchique envers Dame Nature.  » voilà bien résumée notre situation.

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      • Avatar de Michel Asti Einomhra Michel Asti dit :

        La vie même est une leçon de choses où l’attention est indispensable au maintien de l’équilibre. Bien à vous.

        […]-[…]

        Lorsque je réfléchis à l’amitié, une question me paraît importante : doit – elle son origine à la faiblesse ou au besoin, et si les hommes n’y ont cherché qu’un commerce réciproque de services afin de trouver en autrui ce qu’ils ne pourraient avoir eux-mêmes, et de payer à leur tour ces services par des bienfaits semblables… ? Ainsi demander ce que dit le poète envers un vieillard soigneux de l’avenir.

        – La somme de nos maux croit avec les années ; cette raison suffit, c’est assez pour gémir ; c’est même trop, vieillesse je dois te haïr. Mais on peut dire aussi que la somme de nos plaisirs croit avec nos années ; et quant aux maux et aux souffrances, la jeunesse n’en a-t-elle point sa part ?
        – Le pire, à mon avis, des maux de la vieillesse, c’est de s’apercevoir que l’on déplaît sans cesse.
        Cicéron – Œuvres philosophiques majeures
        L’homme est-il une bête avide, fourbe, possessive et destructrice ?

        Lorsque la passion déborde, le réel et véritable sens de la vie se noie. La vie est comme un livre. Ne saute aucun chapitre et continue à tourner les pages… Tôt ou tard tu comprendras pourquoi chaque chapitre était nécessaire. Trop de logique inhibe l’être sensible… Trop de sensibilité intériorise l’esprit logique. De maintenir l’équilibre entre ces deux états autoriserait juste cette extraordinaire capacité d’être humain dans le Monde Naturel Vivant.

        Entre lys & lianes

        Hauts hurlements sortis des nuits d’intérieur
        Ô cris étouffés de derrière les portes
        Porteuses d’aventures nient de ci de là
        Non, non, ce n’est point le vent qui claque.

        Verbes aux ruines des passages déjà nommés
        Visages d’un dieu à la robe couleur de sang
        Discours suivi par les démons d’argent
        Ils portent le tranchant à la place du buis.

        « Nous voulons un monde meilleur ! »
        Souverainisme, populisme, nihilisme, poujadisme,
        Ismes f axés par des guides de malheur,
        Regards attitrés à la virade des égocentrismes.

        Retour vers des prises de gardes sans épiques,
        Titres versés aux balbutiants sans égards,
        Dans le halo des temps kaléidoscopiques,
        Confusion des priorités attire vils étendards.

        Pourtant jadis, l’Olympe et le mont Parnasse avaient frères et bons amis(es)…

        À contre-courant https://lamarante-des-artisans-francais.com/2024/02/09/dheurts-en-demeures-a-tous-nos-maux/

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