Le couteau (nouvelle)

C’était la nuit de la victoire du PSG sur l’Inter, par 5 à 0. Romain était allé au théâtre ce soir-là, ce n’était pas qu’il fût indifférent au sport mais il avait réservé sa place bien avant de connaître la date à laquelle aurait lieu la finale. Il rentrait donc vers le petit appartement que lui prêtait régulièrement son patron, et qui se trouvait rue Buffon, tout près de l’entrée du Jardin des Plantes, à deux pas de la Grande Mosquée. Il faisait bon, ce doux soir qui faisait la jonction entre mai et juin. Dès qu’il était sorti du théâtre, il avait ressenti la profonde liesse qui emplissait les rues de Paris après la lourde défaite infligée au club italien. De chaque bistrot sortaient des clameurs, les parisiens venaient de marquer le quatrième but. Dans le métro, les voyageurs avaient les yeux rivés sur leur portable pour y capter des images dépassant toutes leurs attentes. A peine descendait-il à la station Gare d’Austerlitz qu’il perçut de nouveaux cris de joie. Les touristes étrangers s’amusaient, ils n’avaient pas calculé leurs date de séjour en fonction des prévisions footballistiques et ils se retrouvaient pris dans une fête qui allait selon toute évidence se prolonger toute la nuit. Dans la cour extérieure de la gare, une grue était éclairée aux couleurs de la capitale, des Japonaises, à moins qu’elles ne fussent coréennes, photographiaient cet instrument de travaux qui, à d’autres moments, leur aurait été totalement indifférent. Longeant les grilles du Jardin des Plantes, il entendait de loin les pétards qui explosaient dans la direction du boulevard Saint-Marcel. Il aurait aimé boire une bière avant de rentrer à l’appartement mais soit les cafés du quartier se refermaient car il était tard, soit, destinés à rester ouverts toute la nuit, ils regorgeaient d’un monde bruyant et surexcité. Romain tout sympathisant qu’il fût à l’égard de ces enthousiasmes qui mettaient sans doute un peu de baume au coeur aux hommes et aux femmes qui, par temps ordinaire, n’avaient pas trop d’occasions de se réjouir, n’était pas prêt à se mêler à la ferveur d’un soir qui allait bien sûr rester isolée, concentrée sur une nuit, un jour, peut-être deux mais allait inévitablement retomber quand les nouvelles du monde submergeraient de nouveau la masse des informations joyeuses liées à l’actualité sportive. Il s’acheta donc une canette de bière à la petite épicerie qui restait ouverte, et décida de rentrer à l’appartement où il s’en désaltèrerait tranquillement. Baptiste était son patron, il dirigeait une agence de voyages dont Romain supervisait l’activité trekking. En raison de leur emploi, les deux voyageaient beaucoup et avaient besoin d’un pied à terre à Paris, ils se partageait donc ce lieu, fort bien situé, dans un cadre agréable, les fenêtres coté cour dominant un charmant jardin, très fleuri, commun à d’autres maisons, dont une, très basse, donnait l’impression d’une ancienne dépendance, ou d’une sorte d’auberge près de laquelle autrefois peut-être des chevaux de calèche venaient se désaltérer. Il monta quatre à quatre les trois étages du petit immeuble, enfila sa clé dans la serrure et se retrouva en un clin d’oeil dans une pièce remarquablement spacieuse qui faisait à la fois salon et cuisine. Une bouteille de rhum des Caraïbes l’attendait au coin d’un miroir. La cuisine était bien équipée. Micro-ondes, cuisinière électrique, lave-vaisselle, bouilloire, frigo bien sûr, où, cependant, ne se trouvaient que peu de victuailles, juste une plaquette de beurre, une bouteille d’eau, vite, refermons la parenthèse. Tout en tirant vers lui l’opercule de sa canette – la bière se mit à bouillonner – il réalisa qu’en plus, tout près de lui, se trouvait une étonnante batterie de couteaux, de ces ensembles que l’on trouve à vendre dans les boutiques de vaisselle de luxe, lame aiguisée, solide, de diverses tailles, il y en avait d’ailleurs trois rangées de quatre, c’est dire tout ce que l’on pouvait couper, fendre, découper en fines tranches, désosser au moyen de cet attirail. Tout en commençant de siroter sa bière, il commença à en tirer un de son logement, pour en admirer le poli et la finesse, puis un deuxième, puis… Là, il s’arrêta, interloqué. Merde, se dit-il, c’est du sang.

Romain avait beau ne pas être expert en taches de sang, il en savait assez pour bien voir que la lame du couteau était pleine d’un sang poisseux, rouge virant sur le brunâtre, ayant commencé à sécher mais cela devait être depuis peu de temps car sinon il y aurait juste eu une croûte marron et sèche, ce qui n’était pas le cas. Alors à quoi avait servi ce couteau dans un passé très rapproché ? Une vague de peur lui envahit le cerveau, liée à toutes les images que l’on a du couteau et du sang. Couteau sacrificiel ? Avait-on égorgé un mouton, un agneau, voire seulement une poule dans ce bel appartement propre et blanc, auquel cas sans doute verrait-on des traces de l’opération ? Banal couteau pour la découpe d’un de ces animaux, mais alors il aurait fallu qu’il fût peu cuit… bien saignant, et nous étions de retour au cas précédent. Ou bien… oui, ou bien couteau criminel, couteau qui avait tué, qui s’était planté dans le corps d’un humain. Mais qu’avait-on fait du corps ? Que pouvait-il bien faire de ce couteau sanglant ? Courir à la police pour signaler un meurtre ? Mais de qui, où ça, quand ? Avait-on au moins signalé une disparition récente, à défaut d’avoir retrouvé un corps poignardé ? Romain se dépêcha de remettre le couteau à sa place, dans la position exacte où il l’avait trouvé, juste le manche dépassant du compartiment où il se logeait. La chose la plus raisonnable maintenant était de faire comme si de rien n’était, comme s’il n’avait rien vu. Après tout, sa démarche d’examen des couteaux de cuisine avait été accomplie totalement au hasard, il aurait très bien pu ne même pas remarquer ces ustensiles, maint visiteur en cette pièce n’y aurait d’ailleurs prêté aucune attention, beaucoup de gens s’attendent à trouver des couteaux dans une cuisine, Romain était bien la seule personne que cela avait pu étonner et il n’avait agi que par curiosité, curiosité malsaine on en convient, mais simple curiosité occasionnée par un aléa. Curieux qu’il était, il aurait aussi bien pu déboucher la bouteille de rhum, le humer pour sentir son parfum et peut-être en goûter une lampée, ce qu’il fit d’ailleurs tout de suite afin de se remettre d’aplomb. Pas mal, il adorait les rhums chaleureux de l’Amérique du Sud. Que faire maintenant, après une bière – non terminée, à cause de tous ces contretemps – et un petit coup de rhum ? Oublier le couteau et se coucher pour dormir jusqu’au lendemain.

Romain se coucha donc et attendit le sommeil, le cerveau malgré tout perturbé. Et puis ce bruit dehors, qui n’arrêtait pas, on klaxonnait, on hurlait, on faisait exploser des pétards, des feux d’artifice. Romain se demandait à quoi ça rimait, tout ça. Les sociologues du sport prétendent que c’est l’idée de nation qui est à la base des émotions collectives ressenties après un match où « son » équipe a gagné, mais là justement, ce n’était pas le cas. L’équipe qui venait de gagner était entraînée par un coach espagnol, dirigée par un homme d’affaires qatari, le capitaine était brésilien, le gardien italien. Comme disait la chanson de Maurice Chevalier, « et tout ça, ça fait d’excellents français, d’excellents français » etc. mais non, c’est ridicule. On avait pris des joueurs, on les avait payé cher, on avait mis à leur tête un entraîneur et on avait à tout ce paquet collé une étiquette : Paris. IL pouvait se le dire maintenant : tous ces maillots de Qatar Airways l’avaient ennuyé. Mais enfin, si ça peut donner de la joie, si ça peut procurer de beaux moments de sport… Les buts avaient été très beaux, à ce qu’en disaient les chroniqueurs. Lui n’avait pu voir que le dernier, au travers de la vitrine d’un des seuls cafés du quartier encore ouverts, et oui, c’était bien joué, miracle de précision, je te passe à un joueur en retrait, qui fait une rapide passe à un autre, qui fait une passe latérale à l’avant qui était le mieux placé, et hop, celui-ci n’avait plus qu’à mettre le ballon dans le filet, ni vu, ni connu, le gardien embrouillé, cela méritait bien une explosion de joie. Mais bien sûr, si les rôles avaient été inversés, si c’étaient les italiens qui avaient joué comme ça… l’enthousiasme n’aurait pas été le même dans les rues de Paris ! Bon, il était temps de dormir maintenant, et on verrait bien le lendemain s’il y avait lieu d’agir à propos de ce couteau….

Au matin, un soleil printanier envahissait la couche où il avait dormi, et même rêvé. Il ne pensait plus au couteau, ni au sang bien sûr. Il eut envie de prendre un petit déjeuner à la Mosquée, il adorait les gâteaux orientaux, le thé à la menthe, les cafés turcs, et peut-être une crêpe, mais pas à la Nutella, non quand même, faisons naturel, prenons miel. Le temps était beau, c’était dimanche. L’envie lui prit d’aller visiter les serres du Jardin des Plantes, qu’il n’avait pas vues depuis longtemps. Il fut surpris par la chaleur moite. Impression d’être sous les tropiques, cela lui rappelait une fois où il avait voyagé dans l’Amazonie bolivienne. Escale à Santa Cruz. Parc envoûtant où il s’était retrouvé nez à nez avec un toucan. Il fit ensuite quelques pas dans le jardin à destination des étudiants de l’Ecole de botanique, il y vit une grenouille sur le rebord d’un bassin. Et il reprit le chemin de son appartement. Avant de monter à l’étage, sa curiosité, toujours elle, le poussa à faire quelques pas dans le jardin. Les maisons basses qu’il voyait de la fenêtre étaient habitées, c’était un monde qui vivait là. A gauche après l’entrée, un rez-de-chaussée où travaillait quelqu’un, un homme en gris, penché sur son ordinateur, après quoi il y avait une pièce avec des canapés, un peu comme une salle d’attente. En face, à droite, manifestement la loge d’un concierge, d’ailleurs il l’avait vu la veille rentrer les poubelles et celui-ci lui avait demandé d’un air soupçonneux qui il était et où il allait, il avait vite répondu et le concierge s’était confondu en excuses. Le concierge était marié, manifestement, si l’on en croyait les vêtements tendus dans la cour en train de sécher. En suivant l’allée de dalles, bordée d’arbustes magnifiques dont il ignorait les noms, avec des fleurs étranges, sortes de balais ou de plumes aux corolles minuscules et légères s’effritant au vent, Romain arriva à la fameuse maison basse qui le faisait penser à une auberge ou à une dépendance pour les chevaux d’attelage, la maison avait été drôlement bien restaurée, décorée, aménagée, on voyait au travers des vitres une dame blonde qui s’afférait auprès de sa cuisine, c’est vrai qu’il allait être midi, il partit sans faire de bruit, elle ne l’avait sans doute pas remarqué – ce en quoi il se trompait – et son tour de jardin accompli, il remonta dans l’appartement. Un tour de clé et il retrouvait le lieu intact. Néanmoins, il voulut revenir à la question qui l’avait obsédé une partie de la nuit… que faire avec le couteau ? Il retourna donc au couteau pour encore une fois le contempler et encore une fois demeurer perplexe face à cette tache de sang qu’il avait vue, il tira donc le couteau de son logement. Merde, se dit-il, il n’y a plus aucune trace… comme s’il avait été nettoyé. Se pouvait-il que quelqu’un fût entré en son absence ? Son patron l’avait assuré qu’il n’existait que deux clés, la sienne, et celle qu’il avait prêté à Romain. Tout cela devenait décidément troublant. Il redescendit pour aller manger un sandwich au bistrot de l’angle, il n’allait quand même pas rester dans cette pièce qui, de plus en plus, faisait naître en lui une sourde angoisse.

Un couteau taché de sang, puis qui ne l’est plus. Sans, a priori, d’intervention externe. Mais était-ce le même couteau ? Plutôt que nettoyer le premier, lui en avait-on substitué un second, propre ? Qui avait fait cela ? Cela s’était-il produit au cours de la nuit ou bien pendant qu’il prenait son café à la Mosquée ou qu’il contemplait les ficus géants des serres du Jardin des Plantes ? Romain avait-il un double qui sortait de son corps pour accomplir des gestes bizarres, comme par exemple tuer quelqu’un, ranger le couteau sans le nettoyer, le nettoyer plus tard ? Cela avait-il un sens ? Fallait-il s’en ouvrir au concierge ? À la police ? Et après tout, Baptiste ne lui avait peut-être pas tout dit, pas tout dit de sa vie en tout cas. Peut-être embauchait-il une femme de ménage, laquelle en ce cas aurait eu les clés, mais qui était elle ? Fallait-il qu’il téléphone à Baptiste pour en savoir plus ?

Romain téléphona, mais bien sûr sans réponse, il laissa juste un message pour être rappelé. Puis il se dit qu’il devrait parler au concierge, non pas en lui disant toute la vérité, du moins celle qui lui avait été accessible, autrement dit l’apparence de la réalité, en lui laissant entendre que des choses en apparence peu normales se produisaient dans l’immeuble. Mais en attendant, il allait manger son sandwich. Finalement, il n’y avait plus rien d’anormal. Quelqu’un qui viendrait dans l’appartement maintenant ne découvrirait aucun fait saillant qui éveillerait une suspicion quelconque. Pourtant, le temps ne se remonte pas, un événement peut avoir en apparence effacé un autre événement, il n’en restait pas moins que, dans la vie réelle, le premier avait eu lieu. Le sang avait existé. Il n’était plus là, certes, mais il avait existé et il ne s’était pas effacé tout seul. Romain prit son temps, avant de retourner à l’appartement. Quand il revint, le concierge arrosait les fleurs, il faudrait donc qu’il aille lui parler, mais pour l’heure, il avait besoin d’aller chercher le téléphone qu’il avait oublié sur la petite table du salon, il ouvrit donc la porte et là… ô non ! Pas ça ! Des traces de sang sur le carrelage de la partie cuisine ! C’en était trop, le concierge avait bien dû s’apercevoir de quelque chose !

Le concierge, un homme petit et rablais, avec un léger accent portugais, eut un petit rire entendu ; et si vous alliez demander ce qu’il en est à ma femme ou bien à madame Delmotte, au fond de la cour, elles s’entendent bien toutes les deux ! Tiens, tiens, se dit Romain, il y aurait donc anguille sous roche, un brin de conspiration locale, peut-être, et il se dirigea vers la dame du fond du jardin qu’il avait aperçue la veille en train de préparer son repas. Par les jolies fenêtres quadrillées, on pouvait voir la pièce décorée de plusieurs tableaux, la locataire était peut-être peintre à ses heures perdues. Il frappa et aussitôt, la charmante dame vint pour lui ouvrir, chevelure blonde bouclée descendant sur les épaules, regard vif, air un peu excité, visage mobile et poitrine dorée à ce qu’on pouvait en deviner au travers du corsage aéré. Il fut frappé par sa main bandée. « Justement, je vous attendais, j’étais sûre que vous alliez venir à un moment ou un autre ! Asseyez-vous donc. Je suis confuse. Il a dû vous sembler que de drôles de choses se produisaient dans l’appartement, n’est-ce pas ? » elle lui fit un clin d’oeil entendu. « Vous connaissez l’appartement ? Vous connaissez mon patron Baptiste ? » lui demanda aussitôt Romain. « et comment que je le connais ! Nous sommes amants ». Romain ouvrit de grands yeux… et bien, ça, il ne m’en a pas parlé, le Bat’… il est quand même gonflé, il aurait pu me prévenir ! « oui, vous savez, rajoutait-elle toute rayonnante, nous avons des jeux un peu spéciaux, avec un peu de sadisme pour pimenter l’affaire. Alors il peut arriver que ça dérape. Figurez-vous que trois jours avant que vous ne soyiez là, nous avions décidé de manger ensemble là-haut, j’avais préparé un magnifique rôti, bien saignant et nous nous battions pour savoir qui de nous deux allait l’entamer, avec la pointe de son couteau, l’idiot commençait à me chatouiller les seins, puis il s’en prit à ma gorge, bon je rigolais, c’était plutôt excitant, mais à mon tour, j’ai voulu me défendre et prendre le couteau pour m’amuser avec lui à ses dépens. Non rassurez-vous, cela n’a pas dérapé sur son sexe, rien que d’y penser me donne des frissons, mais non, simplement, un geste malencontreux s’est produit et je me suis retrouvée avec la paume de la main entaillée, d’ailleurs vous voyez, j’ai encore un pansement. Baptiste s’affola car la blessure semblait profonde et, ne prenant même pas la peine d’essuyer la lame, il remit le couteau à sa place et m’embarqua toute séance tenante aux urgences, où ils ont fait ce pansement, voyez : rien de très grave, dans le fond. Lorsque j’ai vu que vous étiez là, je me suis dit qu’il vallait peut-être mieux que je me rende dans l’appartement pour nettoyer le couteau, pour éviter de vous donner des cauchemars. Je ne savais pas que vous aviez déjà découvert l’objet du crime, si j’ose dire !

– Bon, mais et… tout à l’heure, ce sang par terre ?

– Alors là, encore désolée. Mais votre ami Baptiste avait insisté pour que je fasse tout pour que vous ne vous doutiez de rien, c’est d’ailleurs pour cela que je ne suis pas venue directement vous voir pour tout vous raconter. Il est allé jusqu’à me demander de retourner dans l’appartement afin d’y enlever tout ce qui pourrait être l’indice de nos pratiques amoureuses. J’ai donc profité de ce que vous étiez encore absent pour monter, afin de retirer les menues babioles que, je pense, vous n’aviez même pas repérées. Malheureusement, je vous ai entendu marcher dans l’allée, je ne voulais pas que vous me surpreniez, je me suis hâtée, et j’ai glissé sur le sol carrelé, je me suis retenue avec ma main blessée, la blessure s’est réouverte, j’ai saigné, j’ai vite essayé d’essuyer mais vous alliez ouvrir la porte d’un instant à l’autre, j’ai juste eu le temps de sortir en vitesse, de refermer la porte et de monter à l’étage du dessus pour vous rester invisible. J’ai entendu votre réaction de stupeur, vous avez refermé la porte, j’en ai profité pour descendre et rejoindre ma petite maison, où j’ai refait, en vitesse, mon pansement. Et voilà…

Et oui, et voilà. Tout s’expliquait désormais, Romain pouvait remonter tranquillement et se préparer à passer une deuxième nuit, plus tranquille cette fois, dans cet appartement prêté par son pote Baptiste, qui était quand même un peu étrange de vouloir à ce point lui dissimuler ses escapades. Que craignait-il ?

Trois jours plus tard, les amis se revirent. C’était de nouveau à Paris, Romain était resté sur place et Baptiste revenait d’une négociation de contrat aux Etats-Unis avec une agence américaine. Ils s’étaient donnés rendez-vous dans une brasserie de Saint Germain des Près. Romain lui raconta l’histoire. Baptiste était héberlué, il nia carrément toute relation érotique avec une voisine. Quand Romain précisa que celle-ci habitait dans la petite maison à gauche au fond du jardin, il ouvrit de grands yeux : mais cette maison est abandonnée depuis longtemps ! Je n’y ai jamais vu personne ! Mais comment, tu sais bien, cette dame blonde qui vit là, qu’on peut voir par les fenêtres de sa cuisine. Baptiste lui demanda de le suivre, on allait y voir de près ! Ils retournèrent à l’appartement de la rue Buffon, entrèrent par la porte cochère, suivirent la petite allée, laissant sur la droite la loge du concierge et, arrivés au niveau de la maison basse, Romain dut se rendre à l’évidence… qu’il n’y avait pas d’habitant.e. Les pièces étaient sales, noires, abandonnées, des fils d’araignée pendaient au plafond. Quel trouble… comment cela était-il possible ? Avait-il rêvé ? Mais alors tout ce qui s’était passé cette nuit du 31 mai dans Paris était-il faux ? Même la victoire du PSG ? D’une voix tremblante, il osa demander à Baptiste ce qu’il avait pensé du match. Quel match ? Ah oui, la finale de la coupe des champions, là où le PSG s’est encore fait battre par un Inter de Milan autrement plus réaliste ? 1-0 pour Milan. But de Marcus Thuram. Dembele n’avait rien pu faire. Jetant son regard sur les journaux en devanture du kiosque, Romain vit que plus rien ne renvoyait à cet événement sportif, il n’était plus question que des bombardements russes et de l’envoi de denrées à Gaza qui tournait une nouvelle fois au cauchemar pour la population gazaouie. Rien sur le PSG.

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