Aujourd’hui, après quelques nouvelles et quelques récits de voyage, je reviens dans « le lourd » c’est-à-dire mes réflexions sur notre monde actuel telles que me les inspire la lecture d’ouvrages et d’articles appartenant à la tendance « critique de la valeur ». Que certains de mes amis me pardonnent… je ne sais pas encore dire du lourd avec légèreté, mais qu’ils ne désespèrent pas, je reviendrai bientôt à du plus léger. Deux parties : un résumé (en italiques) qui peut suffire en première lecture, suivi d’un développement si l’on veut mieux connaître mes présupposés.
Je continue donc à m’inspirer des thèses de Moishe Postone sur l’antisémitisme perçu au travers des représentations fétiches du capital et de l’anticapitalisme. J’ai esquissé dans la partie précédente la manière dont l’extrême-droite (mais pas seulement…) tirait profit d’une présentation simpliste du capitalisme, le réduisant à une sorte d’opposition entre le pur et l’impur, le pur étant le travail (vu comme concret et valorisé) et l’impur le capital (vu comme abstrait et versé dans la « spéculation »). Encore faudrait-il dire : d’un côté le travail productif, c’est-à-dire celui qui est directement engagé dans la production de marchandises, et de l’autre tout ce qui est prétendument non-productif, à savoir ce qui concerne la gestion de l’argent, mais aussi la gestion du savoir et des connaissances ainsi que les tâches rendues nécessaires par le maintien de l’appareil productif, toutes ces activités ne figurant certes pas au même niveau puisque certaines sont plus prestigieuses que d’autres et certaines sont, surtout, plus rémunérées par le capital (qui en tire finalement profit) que d’autres. On ne comparera pas un petit professeur des écoles et un directeur d’agence bancaire, ni un chirurgien réputé et un médecin de campagne, pourtant ils ou elles ont tous.te.s la particularité de partager un certain éloignement de la chaîne de production proprement dite. Pendant longtemps, on a donc considéré que tous et toutes étaient des « privilégié.e.s », jusqu’à ce que malgré tout, on se rende compte un jour (notamment à l’occasion d’une crise comme celle du Covid) que certain.e.s étaient ramené.e.s à des conditions voisines de celles des travailleurs productifs les moins bien payés. Il n’en reste pas moins que, subjectivement, ces employés, ces éducateurs et ces porteurs de professions libérales continuaient d’appartenir à la catégorie des non-productifs, tantôt enviés, tantôt détestés. De là à ce qu’on les qualifie de « parasites », il n’y a qu’un pas, que certaines composantes du capitalisme actuel, parmi les plus combatives, songeons au trumpisme, n’hésitent pas à franchir. En cela elles ne sont pas très différentes de celles qui, il y a maintenant près d’un siècle, voyaient tout aussi bien comme représentants parfaits de cette catégorie, les Juifs, lesquels, justement, étaient désignés comme les porteurs emblématiques de la spéculation bancaire et du travail intellectuel. Finalement, antisémitisme et anti-intellectualisme (ou, plus généralement haine des non-productifs ou considérés comme tels) sont les deux faces d’une même médaille : on n’aime pas ceux et celles que l’on assimile à un rôle de parasites au motif qu’ils ou elles ne participeraient pas directement à la production de marchandises. A cela il faudrait aussi ajouter l’anti-féminisme au motif que les femmes elles-mêmes n’auraient pas participé à cette production, ou alors, comme dans le cas des éducateurs, des intellectuels et des employés, elles l’auraient fait mais à un niveau jugé subalterne (l’entretien, la maintenance, le careétant très méprisés en regard de la tâche noble de produire). Une certaine gauche rejoint alors ces jugements discriminatoires en prônant le retour aux valeurs saines de la culture ouvrière (un certain Michéa, je crois, illustre cette tendance-là). Pour cette gauche-là, l’ouvrier continue d’être sanctifié comme aux beaux temps du stalinisme. Mais comme a disparu depuis plusieurs décennies le discours « progressiste » qui allait avec (la promesse d’un avenir radieux etc.), il ne reste que la figure abstraite de l’ouvrier, extraite de son contexte et surtout de tout discours progressiste, pour donner du grain à moudre à une certaine pensée d’extrême-droite. Ceux qui se prétendent « proches du peuple » moulent en réalité leurs discours dans des schémas de grande abstraction autrement dit des archétypes. Et ce qu’ils considèrent comme « le peuple » se ramène la plupart du temps à un agglomérat de ressentiments et de haines cuites et recuites structurés par cette opposition fétichiste entre « productifs » et « non productifs », ou « producteurs » et « parasites »1, ou encore « travailleurs concrets » et « intellectuels ». Quant aux productifs eux-mêmes, ils ne tirent aucun avantage de cette ségrégation, utilisés qu’ils sont comme prétextes à ces discours, d’autant que nombre d’entre eux (ainsi que les non-productifs les plus proches des productifs par le fait qu’ils entretiennent et maintiennent les services nécessaires au fonctionnement de l’ensemble) sont issus de populations migrantes ou autrefois colonisées qui tombent sous le rejet raciste que ces soi-disant « populistes » leur opposent. Et nous avons ainsi une forme de capitalisme qui parvient à installer son pouvoir par des élections en apparence démocratiques où le vainqueur est celui ou celle qui promet de chasser les parasites tout en réduisant au maximum les coûts de production afin de maintenir, tant que faire se peut, un niveau acceptable (pour lui) de production de valeur. Laissez-moi encore accroître la valeur du capital, je vous donnerai une consolation dans votre identité retrouvée de producteur blanc, national et genré.
On peut être sidéré de voir ainsi que le capitalisme prospère sur son propre dos pour ainsi dire, puisqu’il tire profit de sa critique, pour autant bien sûr que celle-ci soit faussée (d’autres disent « tronquée ») et repose sur des catégories erronées.

Pour étayer ces propositions, reprenons depuis le début. La représentation classique de la marchandise met en opposition valeur d’usage et valeur d’échange (ou simplement valeur), faisant de la première quelque chose de concret et de la seconde quelque chose d’abstrait, puisque l’échange serait la base même de l’abstraction. Une analyse plus fine, que l’on peut trouver chez Marx si on prend la patience de le lire, montre que l’une ne va pas sans l’autre et que le travail à la base de la valeur est toujours déjà foncièrement abstrait (voir ici) entre autre parce qu’il n’est plus orienté vers l’objet qu’il produit, mais vers l’argent qu’il permet de gagner au travers d’une « vente » dite « vente de la force de travail » qui ne se mesure que de manière abstraite en temps dépensé, de la même manière que le processus productif dans son ensemble n’est pas orienté vers les objets (valeurs d’usage) qu’il produit mais uniquement vers la valeur qu’il fait croître (penser ici au capitalisme financier qui est le couronnement de l’évolution de ce processus dans le temps). Cependant, il demeure que dans la vision du capitalisme telle que véhiculée par le marxisme traditionnel, la contradiction oppose la valeur d’usage associée au travail concret et la valeur destinée à augmenter associée au travail abstrait et au capital.
Il est admis que la survaleur est ce que le capital permet d’engendrer en achetant la force de travail à un prix inférieur à ce que devrait être sa valeur réelle. C’est donc le capital qui engendre de la valeur grâce au travail. Disant cela, on ne se rend pas compte que le travail en question n’est pas un travail supposément « concret » mais que c’est le travail abstrait dont nous venons de parler. En somme, dans ce processus, le « capital » (entité abstraite qu’on ne sait jamais vraiment définir de manière précise) au lieu d’être incarné par une force qui dominerait le processus, est quelque chose de fluide apparaissant sous divers aspects à des instants différents : tantôt somme de valeur accumulée, masse d’argent, tantôt travail abstrait qui entre dans le processus tel un carburant (voir là-dessus Robert Kurz, La substance du capital).
Dans la vulgate marxiste habituelle, qui entend le mot « travail » dans un sens « transhistorique » et prend le travail dit « exploité par le capital » pour du travail concret tel qu’il aurait existé de tout temps (alors qu’on sait que ce que l’on entend par travail dans une société pré-capitaliste, au Moyen-Âge par exemple, ou bien dans une société dite « primitive », n’a rien à voir avec ce que nous, nous entendons par travail quand nous disons par exemple que « nous travaillons pour vivre ») on pose que la contradiction fondamentale est entre travail et capital, associés immédiatement respectivement au concret et à l’abstrait. Or, selon Postone, la contradiction du capitalisme n’est pas là, mais dans ce qui apparaît au cours du processus de valorisation, qui consiste en ce qu’il donnerait la possibilité de se libérer des contraintes du monde marchand en même temps qu’il nous y enfermerait. Pour expliquer : en améliorant la productivité, de moins en moins de travail pourrait être nécessaire pour produire les mêmes quantités de marchandise, libérant ainsi le travailleur de sa corvée, mais d’un autre côté, la réduction du temps de travail entraîne la baisse de la valeur et donc, nécessairement, ce qui a été gagné en valeur grâce à la productivité se retrouve immédiatement perdu puisque selon le schéma capitaliste fondamental, la valeur ne peut provenir que du travail, et doit donc être regagné par plus de travail encore, ce qui va provoquer la nécessité de se déplacer toujours plus loin vers de nouveaux marchés, et puis au-delà, va engendrer, outre la dégradation de l’environnement, la création de tout un ensemble de moyens dévolus à la tâche de transformer les sujets en purs consommateurs, ceci allant de la publicité à ce qu’on peut nommer carrément l’asservissement des consciences par l’usage des medias et des réseaux sociaux.
Une ruse du capitalisme (façon de parler bien sûr, mais le capitalisme n’existerait pas sans cette dimension subjective qui consiste à faire de nous des sujets qui adhèrent à son récit, c’est justement cela qu’on appelle le fétichisme) est donc de nous faire apparaître comme une évidence ce qui n’en est pas une : non, il n’y a pas d’un côté les travailleurs qui fournissent du concret, et de l’autre des spéculateurs éhontés qui les exploitent en manipulant l’argent – lequel est, comme on sait, le comble de l’abstraction. En réalité, travail et capital ne sont pas en opposition, ils coopèrent. André Gorz écrivait déjà cela : « l’aspect le plus important du point de vue de la société, celui qui justifie que l’on parle de société capitaliste, est encore ailleurs : le travail traité comme une marchandise, l’emploi, rend le travail structurellement homogène au capital […] Travail et capital sont fondamentalement complices par leur antagonisme pour autant que « gagner de l’argent » est leur but déterminant. Aux yeux du capital, la nature de la production importe moins que sa rentabilité ; aux yeux du travailleur, elle importe moins que les emplois qu’elle crée et les salaires qu’elle distribue ». Et il concluait : « c’est pourquoi le mouvement ouvrier et le syndicalisme ne sont anticapitalistes que pour autant qu’ils mettent en question non seulement le niveau des salaires et les conditions de travail, mais les finalités de la production, la forme-marchandise du travail qui la réalise ». (c’est moi qui souligne)
Mais la ruse du capitalisme est aussi de nous faire prendre les mouvements et opérations du capital comme des mouvements volontaires accomplis, de leur propre chef et en toute liberté, par des agents bien concrets en chair et en os. C’est ce que Postone appelle la biologisation des rapports sociaux. Le rapport social (c’est-à-dire le rapport constitutif de la relation marchande au sein du processus de la marchandise, celui qui fait que les relations sociales au sein de ce monde sont des relations entre objets avant d’être des relations entre sujets2) apparaît bien sûr déjà comme « naturel » : nous n’arrivons pas à penser notre vie en dehors de ce rapport qui nous attache à un travail (pour ne pas dire qu’il nous en rend « esclave ») en tant qu’il nous procurerait le moyen de gagner « notre argent », ou encore de « gagner notre vie », mais cela ne suffit pas, il faut aussi qu’il nous apparaisse comme étant lié à notre nature humaine, et encore, à l’intérieur de celle-ci, à une catégorie qui nous définirait (blanc ou noir, chrétien ou musulman ou juif) au même titre que certaines habitudes et certains comportements animaux sont liés par nature à une espèce ou à une « race ».
Nous retombons dans le rapport fétiche parce que nous gommons complètement ce qu’il y a d’historique dans ce rapport, pour le voir de façon inversée : ce n’est plus la contingence de l’histoire qui explique les habitudes et les contraintes que nous subissons, mais ce sont ces contraintes et ces habitudes, en quelque sorte « naturalisées », qui rendent compte de l’histoire. Cette naturalisation, on le sait bien, est à la source de l’essentialisme et du racisme de façon globale, mais plus spécifiquement dans le cadre du capitalisme, elle est à la source de l’antisémitisme dans la mesure où un pas est vite franchi : les entités abstraites et structurelles qui sont mises en activité par le capitalisme (le travail, le capital, la marchandise…) doivent être incarnées par des groupes humains, des classes sociales, des groupes définis par des caractéristiques ethniques ou religieuses, ainsi en va-t-il des Juifs qui, « de tout temps », ont symbolisé un certain rapport à l’argent, au travers des opérations de prêt et de spéculation auxquelles ils étaient amenés à se livrer sous la pression d’autres groupes religieux (les chrétiens principalement) qui ne voulaient pas « se salir les mains ».
Dans la vision traditionnaliste et simpliste du capitalisme, puisque, comme nous l’avons vu, celui-ci y est vu comme simple opposition entre travail produisant une valeur d’usage concrète et capital se réalisant dans l’argent, sa critique se réduit à une seule dimension : la critique de l’argent (et non du travail, perçu comme concret) et c’est à cette critique que se sont livrés de nombreux auteurs qui se sont attaqués au capitalisme (par exemple Proudhon) : ils ont préservé l’élément dit concret et s’en sont pris à l’argent. Ainsi voit-on souvent, dans la période récente, une défense du capitalisme industriel face au capitalisme financier, comme si le second seul était le mal, alors que bien entendu ils sont dans le prolongement l’un de l’autre. Comme indiqué plus haut, quand le processus de production des marchandises est dissocié du processus de valorisation, il est vu comme une réalité naturelle, vivante, pensable en termes biologiques, alors que le processus de la valeur, c’est-à-dire le volet « argent », est plutôt vu comme quelque chose qui le parasite. Une forme d’anticapitalisme (anticapitalisme fétichisé dirons-nous) apparaît alors qui prend le parti du premier contre le second. Cette forme d’anticapitalisme, dit Postone, repose sur une attaque unilatérale contre l’abstrait. L’abstrait et le concret ne sont pas vus comme constituant une antinomie où le dépassement réel de l’abstrait – de la dimension-valeur – implique le dépassement historique de l’antinomie elle-même et de chacun de ses termes. En fait, il n’y a là qu’une attaque unilatérale contre la raison abstraite et le droit abstrait ou, à un autre niveau, contre le capital-argent et le capital financier. Et ce n’est pas seulement le processus qui est « biologisé » (vu comme un processus naturel), c’est aussi la dimension abstraite à laquelle on s’attaque, laquelle, cette fois, est biologisée dans la figure du Juif. Ainsi l’opposition fétichisée du matériel concret et de l’abstrait, du « naturel » et de l’« artificiel » se mue en une opposition raciale entre l’Aryen et le Juif3. L’antisémitisme moderne, dit encore Postone, consiste en la biologisation du capitalisme saisi sous la forme de l’abstrait phénoménal, biologisation qui transforme le capitalisme en « juiverie internationale ».
Cette analyse ressemble par certains côtés à celle de prédécesseurs comme Max Horkheimer, mais les dépasse toutefois en affirmant que les Juifs ne sont pas seulement identifiés à l’argent, mais au capitalisme lui-même4. L’opposition raciale entre Aryen et Juif est le fétiche dégradé qui représente à une époque donnée l’opposition entre concret et abstrait. A cette époque, le nazisme se présente à peu de frais comme un « anticapitalisme » dans la simple mesure où il prévoit d’éradiquer les Juifs.
Le Marx de 1843 ne disait pas autre chose, confirmant en cela partiellement l’analyse de Postone, lorsqu’il assénait ces sentences : « Quel est le fond séculier de la judéité ? Le besoin pratique, l’utilité personnelle. Quel est le culte séculier du Juif ? Le marchandage. Quel est son Dieu séculier ? L’argent ». Affirmant sans peur « qu’en s’émancipant du marchandage et de l’argent, par conséquent de la judéité réelle et pratique, l’époque actuelle s’émanciperait elle-même. Et que si l’on ne peut affranchir les Juifs du marchandage et de l’argent, eh bien, il n’y a qu’à s’émanciper des Juifs ». On s’étonne bien sûr, on se dit qu’il n’a pas pu dire de telles horreurs, et puis, que de toutes façons, le concept d’antisémitisme n’existait même pas en ce temps-là, tout cela pour se rassurer, mais il reste que ces propos ne font que précéder de moins d’un siècle l’éclosion du nazisme.
En 2025, les choses ont un peu changé, l’antisémitisme n’est plus exactement de la même nature, même s’il revient périodiquement sous les mêmes dénonciations, d’autres catégories sociales prennent le relais du statut d’objet d’une vindicte pour cause de « spéculation » et de travail « inutile » parce que « non productif », notamment les intellectuels et les travailleurs sociaux, ainsi que ceux que l’on appelle des fonctionnaires, qui seront parmi les principales victimes de cette nouvelle forme que revêt le capitalisme à l’ère du trumpisme. On verra alors se déployer le trumpisme (pour combien de temps ? Nul ne le sait encore, peut-être pour peu de temps, mais cela sera encore trop) comme variante ultime de la crise consubstantielle au capitalisme depuis ses débuts.
1 Pour reprendre le titre du livre de Michel Feher
2 Dans le capitalisme, à la différence d’autres systèmes où les rapports sociaux apparaissent « non-déguisés » comme dit Postone, c’est-à-dire apparaissent crûment pour ce qu’ils sont, souvent des rapports hiérarchiques, il n’y a plus de rapport social que celui fourni par le travail abstrait grâce auquel un producteur acquiert le produit d’un autre producteur (au lieu de consommer ce qu’il a lui-même produit), ainsi la relation sociale entre les deux producteurs n’est-elle ni hiérarchique ni d’affinité, mais reliée à la simple existence d’un bien produit, c’est-à-dire d’un objet. Le travail est médiation sociale
3 On connaît des formes plus modernes de cette opposition, comme par exemple l’opposition, décrite dans un livre récent du philosophe Michel Feher, entre « producteurs » et « parasites », sous le nom importé des Etats-Unis de producérisme, et qui fait le lit du Rassemblement National. Les « producteurs » ce sont tous ceux qui sont du côté du « travail concret », cette face de la marchandise qui est glorifiée, alors que les « parasites » ce sont tous ceux qui sont du côté de l’abstrait, y compris bien entendu les intellectuels et le monde de la culture (qui n’ont qu’à bien se tenir…).
4 On pourrait ici objecter que le nazisme n’en avait pas seulement après le capitalisme (« ploutocrate ») mais aussi et peut-être même encore plus après le « communisme » ou « bolchevisme ». C’est la critique que l’on pouvait faire à Horkheimer quand il identifiait les Juifs à la seule possession de l’argent (et pas à l’aspect abstrait du proces capitaliste). L’analyse de Postone diffère puisqu’il ne se laisse pas prendre à l’illusion d’un bolchevisme qui serait un vrai anticapitalisme. Au contraire de cela, le soviétisme exagère certains traits du capitalisme, il faut produire à tout prix et rien ne saurait se mettre en travers de l’objectif de production, il se presente comme un « modernisme » qui veut détruire tout reste de féodalité (alors que le nazisme aurait plutôt tendance à glorifier la culture du passé). Le soviétisme était un capitalisme d’État.

