Nous ne pouvons mieux vérifier à quel point la société fabrique l’individu, comme le fait une machine, qu’en regardant fonctionner une autre société que la nôtre. La nôtre, nous y sommes trop immergés, nous voyons à travers ses propres yeux, nous sentons avec ses propres sens et même, nous la pensons avec ses propres structures intellectuelles, nous n’arrivons donc pas à l’objectiver, tandis que l’autre, nous ne la voyons ni ne la sentons ni ne la pensons avec ses structures mentales ou perceptives à elle, mais avec les nôtres, et cela introduit un décalage propice à la réflexion. Et la fameuse impression d’« incompréhension » entre les cultures, bien entendu. Mais cette incompréhension est un mythe, elle n’est que l’effet du décalage de nos structures. Elle ne fait que reprendre l’idée que nous ne pourrions jamais comprendre les comportements d’autrui parce que nous ne sommes pas lui, ou comme si seules nos structures étaient les structures valides, les autres renvoyant à quelques bizarreries inaccessibles à nos sens et à notre pensée. Et bien non, il faut reprendre ici sans doute le chemin des réflexions d’un Levi-Strauss qui a voulu nous montrer que l’on était capable de « comprendre » pour peu que nous adoptions un point de vue décentré, ne consistant pas dans le point de vue unique d’un « je » qui s’estime tout puissant. Il faut pour cela faire l’effort (parfois presque surhumain) de s’abstraire, de regarder du plus haut possible comment s’agencent les pièces d’un puzzle, de ce puzzle qui forme une société ou une culture. J’ai le sentiment souvent que nous y parvenons bien mal, que Levi-Strauss à force de patience y est parvenu peut-être pour les sociétés qu’il a étudiées, en Amazonie ou en Australie, à partir de la confrontation des mythes et des pratiques culturelles (en particulier culinaires), mais que cela ne s’est guère étendu à d’autres. Ce voyage au Japon remet ces considérations au devant de ma pensée, d’autant que Lévi-Strauss, au Japon, il y est allé et qu’il en a même tiré un livre, qui est un recueil de conférences : L’autre face de la Lune, écrits sur le Japon, publié dans la collection dirigée au Seuil par Maurice Olender. Certes, il y confesse son ignorance (Claude Levi-Strauss n’a jamais à proprement parler « travaillé » sur le Japon), mais il dit avec ravissement que le voyage qu’il a fait et qui n’a pas excédé six semaines a opéré « un véritable tournant dans [sa] pensée et dans [sa] vie ».
Il est commun de dire, parmi les Européens, que « le Japon nous dépasse », que nous n’y comprenons rien, que nos schèmes d’interprétation sont inopérants. De fait, ça ne fonctionne pas comme chez nous. L’ordre, le respect, la distance sociale, tout cela nous surprend, nous ne comprenons pas comment cela est possible. Il est courant d’entendre exprimé un agacement : nous ne pourrions jamais savoir ce qu’ils pensent vraiment, leur courtoisie et leurs courbettes cacheraient, paraît-il, une extrême hypocrisie, ils nous souriraient mais derrière le sourire, il faudrait entendre un « va te faire voir ! ». Dans ma naïveté d’autrefois, j’avais photographié dans les rues de Kyôto, quartier de Gion, une geïsha qui, par pur hasard, avançait à ma rencontre et souriait. J’avais rendu publique cette photographie en prétendant que cette jeune femme me souriait, suscitant la moquerie d’un correspondant que je connaissais un peu, vivant au Japon depuis longtemps, qui m’avait répondu : elle ne vous sourit pas, elle exprime son agacement à votre égard. Et cela sans doute était vrai. Mais cela nous renvoie-t-il nécessairement, de façon simpliste, à une pseudo incompréhension voire pire à une hypocrisie supposée des mœurs ? N’est-ce pas plutôt que les signes s’agencent autrement et que dans la syntaxe d’un langage difficile à apprendre – comme le sont tous les langages – un acte qui nous paraît simple, comme celui de sourire, revêt structurellement une signification distincte que celle que nous lui attribuons communément ? Il faut apprendre à parler. Il faut apprendre que par exemple, le verbe « oser » dans le parler de Suisse romande n’a pas la même signification que dans celui du centre de la France. « Au Japon, la coutume veut que… » et on croit avoir tout dit, comme si la notion de coutume, à nous devait être étrangère. Alors que nous aussi avons nos coutumes mais que nous ne les voyons plus, celle de nous chamailler, celle de nous croire les plus forts, tout en acceptant la servitude, comme le font tous les peuples de la Terre, à un semblant de Loi, à une constitution ou à ce qu’on appelle un « système de valeurs ». Ou à des mythes nationaux (comme le montre la soi-disant affaire Depardieu qu’on expliquerait par l’esprit « naturellement » rabelaisien que partageraient les « bons Français »). Vues de loin, les pratiques d’une autre culture, par exemple japonaise, peuvent nous paraître sublimes ou ridicules, où est la différence ? Le soin mis par le personnage de Wim Wenders à nettoyer les toilettes de Tokyo nous émeut et nous semble être symbolique d’un style de vie doté d’une grande poésie, mais à côté de cela, le conformisme et la passivité dont on dit qu’ont témoigné les agents de l’industrie nucléaire au moment de l’accident de Fukushima nous révoltent (comme si dans des cas semblables, nous n’aurions pas d’attitudes similaires, le comportement visant à s’en remettre à un supérieur hiérarchique en cas de difficulté non prévue étant chose du monde la mieux partagée).

L’aspect machinique de la société, de toute société, se montre le mieux quand il y a un bug. On aura fait un geste inattendu. La carte magnétique se sera toute seule démagnétisée dans notre poche et nous aura laissés dans un profond embarras à l’entrée de la ligne de métro parce que nous pensons dans un premier temps que nous n’avons pas su la recharger. Un retard se sera produit là où il ne s’en produit jamais. Un passager se sera trompé de place dans un Shinkansen. Il aura pris celui de 10h18 au lieu du 10h22. Un homme aura regardé une femme droit dans les yeux. On aura fait attention à un détail qui aurait du être ignoré, un chien qui se sera échappé, une femme de statut précaire cherchant un peu de monnaie au fond des rendus des automates. On se sera trompé de sens dans l’ordre des salles du temple que l’on visite. On aura mis la carte d’abonnement dans la fente destinée aux billets à l’unité. On aura mal compris la direction de la file d’attente. Incidents qui génèrent des moments de panique furtifs, de brusques arrêts de la machine, qui nous la révèlent tout à coup pour ce qu’elle est, une machine. La mise sur le même plan des aspects techniques (la carte démagnétisée) et socio-culturels (avoir regardé quelqu’un dans les yeux) est à dessein car ils sont tous les ingrédients d’une machine. Une machine est ainsi la somme de ses pannes et de ses modes de survie à celles-ci. Venue d’une autre machine, notre perception s’attache aux pannes de celle que nous avons sous les yeux comme si nous pensions avec fierté que « chez nous, cela ne se passerait pas comme ça, nous ne sommes pas aussi « compliqués » ». C’est à voir, bien sûr.
Et que reste-t-il à l’individu dans tout cela ? Peu de choses même s’il n’est pas rien. Les structuralistes avaient raison – tel est mon point de vue – de dire qu’il n’était jamais que l’effet dans une structure. C’est pour cela qu’on peut tendre à l’excuser d’être ce qu’il est (souvent lâche, passif, servile…) et qu’en même temps on peut lui en vouloir tellement (il est si aisé d’en faire un bouc-émissaire, si aisé d’en faire un fétiche propice à l’expression de tous nos mécontentements).
Mais l’effet dans une structure, c’est déjà quelque chose, c’est entendre comme une suggestion que d’un effet pourrait naître une transformation. D’où surgirait tout à coup comme une idée de liberté. Le pas de côté, l’invention d’une écriture (voir au musée national de Corée son moment de surgissement dans le royaume de Silla), la création musicale, le subreptice changement dans un rythme. Toutes les sociétés, toutes les cultures connaissent cela, en quoi elles sont toutes dotées d’histoire.

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La structure qui émerge le plus peut-être dans le monde asiatique centré sur la Chine, le Japon et la Corée, est celle de l’emboîtement de carrés, tous limités par des enceintes. Cette structure physique est en même temps une structure mentale. Chaque fois que je reviens du Japon, pendant ces jours confus où la fatigue accumulée et le décalage horaire nous font dormir à des moments décalés, je fais des rêves qui restent en moi par la suite. Une fois dans le passé, c’était le rêve blanc, celui de devoir affronter une blancheur absolue, laquelle m’avait épouvanté : était-ce signe de mort, d’effacement total du disque dur ? Cette fois-ci je me réveille avec ces mots : « We are the Meaning », Nous sommes le Sens, complétés par (approximativement) : nous devons nous aider nous-mêmes à nous en sortir. Aussitôt, je vois les enceintes, celles des monastères et des châteaux, des capitales aussi, dont le plan provint presque toujours de celui de Ch’ang, la capitale des Tang, qui inspira les capitales coréennes (Gheongju par exemple), puis japonaises, comme Heijio-kyô et Heian-kyô. Mon rêve me dit que notre esprit est structuré comme elles, sous forme d’enceintes successives et que ce que nous devons faire, mais nous avons en nous les ressources pour cela, c’est de les franchir toutes, depuis le centre jusque vers l’extérieur. Ceci fait, nous serons toujours le Sens mais enrichi des épreuves subies, libéré en quelque sorte. C’est là où l’expérience du voyage nous conduit vers nous-mêmes. Et aucune autre ne nous fournit cela, car aucune autre ne nous donnerait autant de difficultés éprouvées dans notre corps certes, mais aussi et surtout dans notre esprit, qui a dû s’adapter à ce dont il n’avait pas l’habitude. Notre voyage agit à ces moments comme une sorte de psychanalyse, qui ne mettrait pas au premier plan nos fantasmes ni nos failles individuels mais nos représentations collectives, afin d’opérer face à elles enfin un pas de côté, même minime.
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Lorsque je raconte mes voyages, comme je viens de le faire plusieurs semaines de suite, je tends à adopter un point de vue non critique. Voilà bien, diront certains, le plus parfait esprit bourgeois qui se satisfait de ce qui lui semble une aventure mais est loin d’en être une et qui s’émerveille d’un rien. En somme une adhésion à une forme qui serait purement dictée par l’idéologie régnante.
Je l’ai dit plus haut, concernant mon voyage à Seoul : en voyageant, nous cherchons à fuir quelque chose, une réalité que nous ne voulons pas voir, ou que nous ne voulons plus voir (elle nous assaille tous les jours, nous ne savons plus comment la gérer etc. nous sommes dans la position de ce couple d’Israëliens dont j’ai parlé, rencontré à Naoshima, qui, selon ses propres dires, voyageait pour fuir la situation actuelle). Je veux bien concéder cet aspect des choses. Et pourtant, il y a, dans le voyage, tout ce que je viens de dire plus haut, ces moments de dépossession de soi, ces écarts à notre norme vécue qui nous obligent à réfléchir, à comprendre qu’il y a d’autres visions du monde que la nôtre.
Un auteur que je lisais récemment, qui se veut très critique envers la société et va chercher jusque dans l’idéologie des Lumières la cause de ce dont elle souffre, remettait en cause, à juste titre, le faux universalisme, mais ce faisant, il ne faisait que partir de la vision occidentale du monde (car les Lumières, qu’est-ce donc d’autre qu’une formation idéologique propre à l’Occident?). De façon générale, l’histoire du capitalisme n’est perçue en général que sous l’angle occidentaliste. Or, il existe aussi un capitalisme ailleurs, en Orient, en Extrême-Orient, au Japon, en Corée, en Chine. Il n’a pas les mêmes racines. D’autres systèmes l’ont précédé. Je ne sais pas du tout si le terme d’idéologie bourgeoise convient à la description de la société japonaise, par exemple, si là-bas, il y a une notion de sujet qui lui correspond, il me semble même qu’au contraire, l’individu-sujet dominant de l’Occident n’y est pas présent. Se rendre compte de cela devrait élargir nos perspectives, nous permettre de relativiser l’importance de l’Occident dans nos réflexions, d’éviter peut-être de nous enrager à l’égard de nous-mêmes dans des élans passionnels qui ont parfois quelque chose de mortifère.

Intéressant. Je ne suis pas une grand fan de Claude Lévi-Strauss, bien qu’ayant une dette impayable à la pensée structuraliste qui continue à me façonner.
Il me semble discutable ? regrettable ? que cette pensée structuraliste a été apparenté à une machine, et il me semble qu’il serait bon d’interroger cela. Le mot « machine » revient souvent dans votre écrit plus haut, et le mot « machine » domine notre cosmogonie moderne en Occident en ce moment. Cela me rend triste, cette façon de coller cette métaphore sur les déterminations auxquelles nous sommes soumis dans nos vies d’êtres humains, car c’est bel et bien une métaphore, preuve s’il en est, que nous avons les métaphores que nous pouvons.
Mais je ne peux pas m’empêcher de me dire combien c’est commode cette métaphore « machine » pour évacuer nos êtres charnels, et que derrière la métaphore « machine », il y a une volonté collective ? d’échapper aux exigences, ainsi qu’aux déterminations, que notre être charnel impose. Pour être provocatrice, comme je sais l’être, il me semble parfois que la visée de la civilisation est de nous permettre de ne pas nous salir, de ne pas nous salir les mains, la saleté étant quelque chose d’immonde. Dans le but d’échapper au « dirt », qui nous a donné « dirty » en anglais, ce qui n’est pas rien, car le « dirt », c’est aussi la terre, et la terre nourricière.
Ce que vous décrivez comme « aspect machinique » pour moi relève déjà d’une volonté de maîtrise de l’inconnu, de l’imprévisible, ainsi que d’une foi, pour moi étrange, que l’organisation, y compris le symbolique lui-même, puisse évacuer l’inconnu, l’imprévisible.
Je viens de finir un très beau roman de Lewis Grassic Gibbon, écrivain écossais vivant au début du 20ème siècle, qui décrit dans « Sunset Song » la manière dont la vie traditionnelle ? du fermier travaillant sa parcelle a été détruite sous la pression de ce que vous appelez la machine ? (D’autres diraient cela.) Qu’est-ce qui est détruit : le sentiment intime du fermier de faire corps avec sa terre, de vivre au plus près des rythmes des saisons, avec un travail qui est une charge, un travail où il a la charge de la terre pour se nourrir. Dit comme cela, je comprends pourquoi il y a toujours une si grande volonté universelle ? occidentale ? à détruire cette conscience, cette fusion avec la terre qui est aux antipodes d’une existence… cosmopolite, comme ce que vous avez décrit plus haut. Etre enraciné n’est pas être cosmopolite du tout. Est-ce… un esclavage ? Je crois que non, pour ma part, et depuis mon identité de cosmopolite de très longue date maintenant. En ce moment, je vois surgir en Occident cette… panique qui vient du sentiment confus que même le citadin a besoin de mettre de la nourriture sous la dent, et dans le ventre, pour vivre, et même le citadin ne peut pas y échapper. Et mettre quelque chose sous la dent ne se résume pas à aller au supermarché pour poser ses ronds et rapporter des denrées à la maison. D’où… la panique, à mes yeux.
Enfin, je vois un très grand éclatement dans le cadre de nos vies en ce moment. Il y a 7 ans ? un grand nombre de personnes de mon entourage ont commencé à exiger qu’on enlève nos chaussures en entrant chez eux, tout en enlevant leurs chaussures pour entrer chez nous, des fois, sans qu’on le leur demande. Cela vient d’où ? Et le nombre invraisemblable de coiffeurs et de barbiers dans la ville de Grenoble maintenant ? Ça vient d’où ? Qu’est-ce qui impulse cela ? Est-ce possible qu’avec l’ampleur de l’immigration qu’il n’y a plus de représentations stables « occidentales » en France ? Et puis, pitié pour le mot « bourgeois ». Il est si fatigué, et il est un bouc émissaire si commode, comme « patriarche », d’ailleurs. Que de tempêtes dans les théières !
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Dans sa récente interview, Salman Rushdie (le grand Salman Rushdie) dit que s’il était un arbre, il voudrait être un banyan car les racines du banyan sont si étendues et resurgissent en tellement d’endroits pour donner lieu à des arbres qu’on ne sait plus très bien où était la racine d’origine. C’est comme cela que je conçois aussi « l’enracinement ».
Les barbiers dans la ville de Grenoble, vous savez bien d’où cela vient, hélas… (blanchiment de l’argent de la drogue) ce n’est pas lié à « l’immigration » proprement dite mais au fait que pour ouvrir un salon de barbier on n’a pas besoin des mêmes diplômes que pour ouvrir un salon de coiffure.
Le réel est ce qu’il est. Pas moyen de se réfugier dans un passé mythique qui ne reviendra plus.
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Beaucoup de questionnements dans ce billet passionnant.L’Asie semble te (et nous également) transporter physiquement et psychiquement. Géographie physique, de l’inconscient, rêveries poétiques .Nous connaissons ton goût pour la littérature japonaise, la poésie, le décalage de Murakami par exemple. Difficile de trancher le débat structure/individu. Des personnalités comme Trump même avec des assises sociales bien structurées s’affranchit, influence et détermine de nouvelles mentalités.La poule et l’oeuf à mon avis.Ta description du voyage est une aventure, notion très relative, singulière et qui se déploie dans les champs d’action et de réflexion.Toujours est il qu’elle incite au débat contradictoire en s’écoutant le plus possible et essayer de ne pas céder au jugement simpliste et à l’invective. Je suis sceptique sur l’idée de fuite du réel lors du voyage. Quel réel? je pars c’est un appel à la rencontre, et le hasard peut m’enrichir. Quand je vais au bistrot je quitte mon chez moi, souvent seul, hors de frontières quotidiennes. Le hasard peut en faire une aventure organise et constitue le réel.
J’ai passé une soirée samedi, parmi les invités certains ont parlé du japon qu’ils avaient visité. Vision du sur organisé, de l’asphyxie collective , quelque chose comme cela en tous cas.Je me suis permis de nuancer leur point de vue en pensant à tes propos: décalage et poésie.
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Le débat structure/individu reconduit le débat encore plus classique entre déterminisme et liberté. Il y avait ce matin sur FC une émission passionnante comparant Descartes et Spinoza et aboutissant à l’idée que finalement, il n’y a pas une telle opposition entre les deux, tous les deux reconnaissent les contraintes qui pèsent sur notre « libre-arbitre » et on ne devient « libre » qu’en en prenant conscience. C’est la même chose avec ce que nous recevons de détermination de la société, nous pouvons nous y affirmer comme individu libre seulement à partir du moment où nous essayons de comprendre vraiment ce qu’est une société, ce qui suppose que nous en connaissions plusieurs et que nous soyons conscients de leur diversité. Je n’aime pas les gens qui critiquent les autres peuples comme s’ils formaient des entités stables, « les japonais », « les suisses », « les belges ». Ce genre de critique traduit toujours une incompréhension et n’est finalement ni plus ni moins qu’une forme de racisme (le racisme étant une essentialisation d’un peuple ou d’une ethnie à partir de traits de contenu supposés intrinsèques, sans essayer de les voir comme mus dans et par une société dont les règles sont aussi arbitraires que les nôtres). La société japonaise n’est certainement pas plus « sur-organisée » que la nôtre, cela se voit quand on s’y balade aux multiples zones incertaines que l’on y rencontre (le film Perfect Days montre bien cela aussi), de soudains terrains vagues en pleine ville, des restaurants en planches qui vendent une nourriture improbable etc. Mais les gens ne voient que les grandes tours de Tokyo et les Shinkansen toujours à l’heure. Tout comme, lorsqu’ils vont en Suisse, ils ne voient que les banques et les publicités pour le chocolat au lieu de voir aussi les gens qui dorment dans leurs caravanes dans les campings, les petits orchestres populaires et les anarchistes de l’industrie horlogère… S’ils savaient souvent comment les sociétés étrangères les considèrent eux-mêmes, ils seraient déboussolés et ne comprendraient pas pourquoi on les regarde parfois avec défiance, à cause de leur arrogance et de leur sureté d’eux-mêmes.
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Et la fameuse impression d’« incompréhension » entre les cultures, bien entendu. Mais cette incompréhension est un mythe… prorogé au fil du temps, par toutes sortes d’opportunisme fermé à la pluridisciplinarité… Et cela commence à l’intérieur d’une nation par la division des savoirs être et la soustraction des savoirs faire… où les citadins, les banlieusards et les ruraux ne se comprennent plus.
Le XXIème siècle est devenu un espace-temps binaire. Il faut faire adhésion au clan du progressisme à n’importe quel prix ou à celui du conservatisme à tout prix. Tous sens d’observance, de critique ou/et d’interrogation envers l’un ou l’autre est suspicieux pour l’autre et l’un. Il faut prendre parti ! Sinon vous n’êtes rien. Quant à la dictature elle peut s’installer sans la sonorité des bottes. Il suffit d’engendrer la désinformation et dénigrer les fondements mêmes de l’école de la République comme à diffamer la laïcité et activer le clientélisme sous divers états de corruption et avec vile propagande.
L’image d’une nation est plus claire lorsqu’elle reflète la lumière de ses divers artistes adjointe à la culture de son peuple, comme ses facultés à appréhender les liens entre les sciences et les arts… ; avec des mots appropriés envers tous les usages.
À FLEUR D’ÉVIDENCES
Rien n’est plus incertain que la conscience
La sagesse maitresse par ses mots affiliés
Murmura aux oreilles de son estudiantin(e) :
‘’ Nous nous laissons souvent séduire,
Et sans fondement sur la belle vision,
Comme tout à chacun et chacune,
D’une certitude nouvellement née,
Croyons fort aisément,
A ce que nous craignons des plus grands désastres
Et désirons du plus grand des plaisirs’’…
[…] Encore faut-il réussir à ne pas passer outre les calomniateurs convaincus et ne pas recourir à leurs maximes sans analyses des paralogismes particuliers et syllogismes divers, afin que la flétrissure généralisée ne soit plus une fragrance à en adopter le verbiage, sans attention ni étude envers la divagation ahurissante de la diversité.
LE TEMPS EST LA MESURE DE TOUTES CHOSES.
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